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02/01/2010

L'ANTÉCHRIST par AUGUSTIN LÉMANN (1)

L’NTÉCHRIST
par AUGUSTIN LÉMANN (1)
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BIOGRAPHIE
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JOSEPH (1836-1915) et AUGUSTIN (1836-1909) LÉMANN  sont deux prêtres, frères jumeaux (homozygotes) d'origine israëlite, nés à LYON. Tôt orphelins, ils se convertirent en 1854. Ils sont auteurs d'environ 150 ouvrages, notamment relatifs aux rapports entre le catholicisme et le judaïsme, et sur le destin spirituel du Peuple JUIF.

Ils fondèrent en 1882 le monastère Carmélite de HAÏFA, mais aussi plusieurs orphelinats et des écoles.

AUGUSTIN était chanoine honoraire de la Primatiale et professeur aux facultés catholiques de LYON. Outre cela, ils furent tous les deux consacrés Évêques. Proches du pape PIE IX, ils participèrent au Ier concile œcuménique du VATICAN et y rédigèrent un Postulatum.

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CHAPITRE PREMIER
Trois portraits de l'Antéchrist tracés prophétiquement dans la Bible.
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PORTRAIT DANS LE LIVRE DE DANIEL : La petite corne grandissante.
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Dans cette petite corne grandissante les Pères, notamment SAINT IRÉNÉE, THÉODORET, LACTANCE, SAINT JÉRÔME, les commentateurs modernes, MALDONAT, CORNÉLIUS A LAPIDE, CALMET, etc., et de nombreux exégètes contemporains, soit catholiques, soit protestants, ont vu à bon droit la figure de l'Antéchrist. La corne (3) est le symbole de la force et de la puissance. Chez certains animaux elle est la grande arme offensive et défensive. Avant les découvertes assyriologiques, il était assez difficile de s'expliquer pourquoi DANIEL avait, de préférence, employé ce symbole pour décrire l'Antéchrist. Aujourd'hui rien ne paraît plus naturel. Dans le milieu chaldéen où vivait ce prophète, les statues des dieux et des rois babyloniens portaient des cornes à leurs tiares. Disposées avec grâce à la base de ces tiares et superposées les unes aux autres, elles constituaient de véritables ornements . Il est donc tout naturel que l'inspiration divine voulant caractériser les développements et la puissance de la domination de l'Antéchrist, ait porté DANIEL vivant et écrivant à BABYLONE à le représenter sous le symbole d'une petite corne grandissante.
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PORTRAIT DANS L'APOCALYPSE : La Bête.
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Je vis monter de la mer une bête qui avait sept têtes et dix cornes, et sur ses cornes dix diadèmes, et sur ses têtes des noms de blasphèmes. Et la bête que je vis était semblable à un léopard, et ses pieds étaient comme les pieds d'un ours, et sa gueule comme la gueule d'un lion ; et le dragon lui donna sa force et une grande puissance. Et je vis une de ses têtes comme blessée à mort, mais cette blessure mortelle fut guérie, et la terre entière fut dans l'admiration, à la suite de la bête. Et ils adorèrent le dragon qui avait donné la puissance à la bête ; et ils adorèrent la bête, en disant. Qui est semblable à la bête ? Et qui pourra combattre contre elle ? Et il lui fut donné une bouche qui proférait de grandes choses et des blasphèmes ; et le pouvoir lui fut donné d'agir pendant quarante-deux mois. Et elle ouvrit la bouche pour blasphémer contre DIEU, pour blasphémer son nom, et son tabernacle, et ceux qui habitent dans le ciel. Et il lui fut donné le pouvoir de faire la guerre aux saints, et de les vaincre ; et la puissance lui fut donnée sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue et toute nation. Et tous les habitants de la terre l'adorèrent, ceux dont les noms n'ont pas été inscrits, depuis la création du monde, dans le livre de l'AGNEAU qui a été immolé.»
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Dans ce second portrait, c'est à une Bête monstrueuse que l'Antéchrist est comparé. On ne peut guère douter, en effet, que cette bête, munie de toute la puissance de Satan et adorée avec lui, ne soit la figure de l'Antéchrist. Tel a été le sentiment commun des commentateurs chrétiens, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours. L'emploi de cette expression «la bête, montre que, dans l'être en question, le caractère bestial dominera, à la place des sentiments humains. La robe du léopard, les pieds de l'ours et la gueule du lion indiquent aussi qu'il réunira la ruse, la férocité et la force.
C'est avec raison que les exégètes reconnaissent également dans la Bête de l'APOCALYPSE le symbole de la Cité du mal avec les grands empires païens qui s'y sont succédé. Mais tous ces empires païens de la Cité du mal viendront aboutir et se résumer dans la personne de l'Antéchrist. Les prophètes présentent et comprennent souvent sous une seule figure plusieurs choses qui arriveront en divers temps, lorsqu'elles ont quelque rapport entre elles. On le constate par cette explication qui fut donnée à SAINT JEAN dans une autre vision de la Bête, symbole, cette fois, de la Cité du mal (4) «L'ange me dit : Les sept têtes sont sept montagnes sur lesquelles la femme est assise : ce sont aussi sept rois (ou sept empires), dont cinq sont tombés ; l'un existe encore, et l'autre n'est pas encore venu ; et, quand il sera venu, il faut qu'il demeure peu (5). Toute la malice et toute la puissance de ces différents empires, qui se sont succédé dans la Cité du mal, figurée par la Bête et ses accessoires, viendront se personnifier et se récapituler dans un individu : l'Antéchrist. C'est donc avec raison que ce nom «la Bête» lui est aussi attribué.
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PORTRAIT DANS LA II° ÉPITRE AUX THESSALONICIENS : L'homme de péché.
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«Il faut que l'apostasie arrive auparavant, et qu'on ait vu paraître l'homme de péché, le fils de la perdition, l'adversaire qui s'élève au-dessus de tout ce qui est appelé DIEU, ou qui est adoré, jusqu'à s'asseoir dans le temple de DIEU, se faisant lui-même passer pour DIEU... Et alors se manifestera cet impie que le Seigneur JÉSUS tuera par un souffle de sa bouche, et qu'il détruira par la lueur de son avènement.
L'avènement (de cet impie) aura lieu selon la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs, et avec toutes les séductions de l'iniquité pour ceux qui périssent, parce qu'ils n'ont pas reçu l'amour de la vérité pour être sauvés. C'est pourquoi DIEU leur enverra une puissance d'égarement, pour qu'ils croient au mensonge, afin que tous ceux qui n'auront pas cru à la vérité, mais qui auront consenti à l'iniquité, soient condamnés.»
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Cette fois, c'est l'homme qui apparaît, avec des traits nettement dessinés, mais l'homme Adversaire du CHRIST et de l'Église, l'homme de péché, le fils de la perdition. «Nul doute, dit SAINT AUGUSTIN, que l'Apôtre ne parle ici de l'Antéchrist. (6)
De ces trois portraits prophétiques, rapprochés les uns des autres, il est possible de tirer des renseignements par rapport à la personne, au règne, à la persécution et à la fin de l'Antéchrist. Ces renseignements, il conviendra de les classer sous quatre chefs, les suivants :
Choses certaines,
Choses probables,
Choses indécises,
Choses fantaisistes.

 
(1) Cet animal extraordinaire, si terrible que DANIEL peut à peine trouver des paroles pour le décrire, représente, dans la vision, l'Empire romain. Il succède au lion (Empire chaldéen), à l'ours (Empire médo-perse), au léopard (Empire d'ALEXANDRE) (DANIEL VII.1-7) - Les dix cornes, chiffre rond, représentent des rois ou des royaumes puissants qui se sont formés du démembrement de l'Empire romain par les Barbares. De ces multiples États surgira la petite corne grandissante ou l'Antéchrist.
(2) L'un des esprits célestes
(3) M. de LONGPÉRIER, décrivant un dieu assyrien, dit «Les cornes du taureau qui décorent la tiare de cette figure sont un signe de puissance et de gloire... La manière dans les cornes sont rangées à la base de la tiare nous explique de quelle façon le prophète DANIEL concevait la disposition des dix cornes du quatrième animal symbolique qu'il vit en songe. (Notice des antiquités assyriennes, p. 30). APOCALYPSE XVII, 1-18.
(5)
Id., XVII, 9-10
(6) SAINT AUGUSTIN, Cité de DIEU, liv. XX, n° 19.
 
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CHAPITRE DEUXIÈME
Personne, Règne, Persécution. - Fin de l'Antéchrist.
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I - CHOSES CERTAINES
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PREMIÈRE CERTITUDE : L'Antéchrist sera une épreuve pour les bons, un châtiment pour les impies et les apostats.
 
a) Épreuve : «Voici que cette corne faisait la guerre aux saints ; et elle l'emportait sur eux.» (DANIEL VIII, 21.) - «Et il lui fut donné (à la Bête) le pouvoir de faire la guerre aux saints et de les vaincre.» (APOCALYPSE ,XIII, 7.)

b) Châtiment : L'avènement de cet impie aura lieu... avec toutes les séductions de l'iniquité pour ceux qui périssent, parce qu'ils n'ont pas reçu l'amour de la vérité pour être sauvés. C'est pourquoi DIEU leur enverra une puissance d'égarement, pour qu'ils croient au mensonge, afin que tous ceux qui n'auront pas cru à la vérité, mais qui auront consenti à l'iniquité,soient condamnés.» (II THESSALONICIENS II,9-11.) -

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DIEU ne place la pierre d'achoppement sur la voie des méchants que lorsqu'ils ont mérité pleinement la punition : ils mettent alors le comble à leurs crimes.

C'est donc par une permission divine que s'accomplira l'avènement de l'Antéchrist. Afin d'éprouver, d'une part, la foi des élus,afin de châtier, d'autre part, l'apostasie d'un grand nombre, Satan recevra, comme à l'égard de JOB, la liberté d'exercer pour un temps sa funeste puissance contre le genre humain. C'est alors que surgira celui que SAINT IRÉNÉE appelle le résumé de toute malice
(1), et que se lèvera ce temps de persécution dont Notre-Seigneur a dit : «il viendra un temps tel qu'il n'y en a pas eu de pareil depuis que les peuples ont commencé (2)
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DEUXIÈME CERTITUDE : L'Antéchrist sera un homme, un individu.
 
«Il faut qu'on ait vu paraître l'homme de péché.» (II THESSALONICIENS II, 3.) L'Antéchrist n'est donc pas une fiction, un mythe, ainsi qu'une plume de critique légère, celle de RENAN, s'est efforcée de l'établir (3).
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Il ne doit pas davantage être confondu avec une secte quelconque, une collection d'impies, un milieu d'athéisme, une période de persécution, ainsi que l'ont pensé certaines âmes pieuses. L'Antéchrist sera une réalité individuelle, une personne, surgissant, il est vrai, à une époque d'athéisme et de sectes perverses, mais, tout en ayant des liens étroits avec ces sectes et ce milieu d'athéisme, il ne laissera pas que d'être lui-même une personne, un individu
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«ayant les yeux d'un homme et une bouche qui proférait de grandes choses et des blasphèmes», (DANIEL VII, 8, 20 ; APOCALYPSE XIII, 5.) (4).

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TROISIÈME CERTITUDE : L'Antéchrist ne sera pas Satan incarné,ni un démon sous une apparence humaine, mais un membre de la famille humaine, un homme,rien qu'un homme.
«L'homme de péché»(II THESSALONICIENS II, 3.)
Sans doute cet être recevra les inspirations de Satan et sera comme son instrument ; Satan sera son conseiller et son inspirateur invisible : il lui prêtera son appui, ses pouvoirs, mais il ne sera pas l'Antéchrist lui-même
(5).
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QUATRIÈME CERTITUDE : L'Antéchrist sera séducteur par certaines qualités de sa personne.

«Cette corne, avait des yeux comme les yeux d'un homme, et une bouche qui proférait de grandes choses.» (DANIEL VII, 8.)

«Et il fut donné à la bête une bouche qui proférait de grandes choses.» (APOCALYPSE XIII, 5.)

«Et ils adorèrent la bête, disant : Qui est semblable à la bête ?»(Id., 4.)-«L'avènement de cet impie aura lieu avec toutes les séductions de l'iniquit» (II THESSALONICIENS II, 8, 10.)

C'est une erreur populaire que de se représenter l'Antéchrist sous des dehors repoussants, comme un résumé de toutes les laideurs physiques. Elle provient probablement de l'interprétation donnée à ces traits du portrait dans l'APOCALYPSE :

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«Je vis monter de la mer une bête qui avait sept têtes et dix cornes,et sur ses cornes dix diadèmes, et sur ses têtes des noms de blasphèmes. Et la bête que je vis était semblable à un léopard, et ses pieds étaient comme les pieds d'un ours, et sa gueule comme la gueule d'un lion». (APOCALYPSE XIII, 2.)
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Loin de représenter l'extérieur physique de l'Antéchrist, ce passage symbolique n'a pour but que de donner une idée de sa vaste puissance, et de l'étendue de son empire, choses dont il sera bientôt question. Les divers textes,qui ont été rappelés, prouvent, au contraire, que la personne de l'Antéchrist ne manquera pas d'attraits séducteurs. Si, en effet, la description de DANIEL met les yeux de l'Antéchrist en relief : Cette corne avait des yeux comme les yeux d'un homme, c'est que les yeux dénotent l'intelligence, la clairvoyance, l'habileté.Mais, parmi les charmes séducteurs, DANIEL et l'APOCALYPSE s'accordent à signaler, comme devant certainement présenter plus de dangers, le charme de la voix et de l'éloquence : Et il fut donné à la bête une bouche qui proférait de grandes choses. De grandes choses ! Les interprètes donnent généralement à ces expressions le sens de paroles exorbitantes, de paroles d'orgueil, de révolte..., des énormités. Mais le mot hébreu dans DANIEL signifiant «grand-grand» indique qu'il peut s'agir aussi de paroles sublimes, éloquentes et entraînantes. L'Ange déchu ayant choisi l'Antéchrist comme chef visible de la suprême bataille à livrer contre le CHRIST et son Église, il lui communiquera quelque chose des charmes naturels et incomparables que l'ÉDEN contempla autrefois avec étonnement dans Lucifer, charmes qui ne lui ont pas été retires, mais dont il abuse pour faire le mal. Sous cette influence occulte, le sublime, dans la bouche du fils de perdition, s'unira au blasphème ; et cette tentation du sublime sera si attrayante, que les élus seraient séduits, si les élus pouvaient l'être (6). Il y a plus : Le portrait, tracé dans l'ÉPÎTRE AUX THESSALONICIENS, laisse apercevoir chez l'Antéchrist une puissance de séduction plus vaste que celle de la voix et de l'éloquence : Avec toutes les séductions de l'iniquité, y est-il dit ; par conséquent,séduction d'une belle prestance et d'un beau visage, séduction du génie, séduction d'une fausse vertu, séduction de prestiges et de prodiges menteurs, unis à la séduction de la voix et de l'éloquence. Et c'est pourquoi la terre, séduite et dans l'admiration s'écrie : Qui est semblable à la bête ?
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CINQUIÈME CERTITUDE : Les débuts de l'Antéchrist seront humbles et peu remarqués.
 
«Je considérais les cornes, et voici, une autre corne, petite, s'éleva au milieu d'elles.» (DANIEL VII, 8.)

L'expression «petite» désigne une puissance faible à ses débuts ; elle paraîtra tout d'abord insignifiante (7).
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SIXIÈME CERTITUDE : 
L'Antéchrist grandira et fera des conquêtes.

«Trois des premières cornes furent arrachées de devant elle.» (DANIEL VII, 8.)

«Cette corne., son apparence était plus grande que celle de ses compagnes.» (Id. 20.)

«Et (l'ange) me parla ainsi : Les dix cornes, ce sont dix rois et un autre s'élèvera après eux......; et il abolira trois rois.» (Id.,24.)

L'Antéchrist grandit jusqu'à devenir roi, et roi conquérant. Trois des dix cornes, c'est-à-dire trois des dix États issus, démembrés de l'ancien empire romain, tombent sous sa puissance. Ils sont arrachés «de devant lui» ; hébraïsme, qui équivaut à : arrachés par lui. Aussi est-il
noté que l'aspect de la petite corne est devenu plus grand que celui de ses compagnes.

Cette dénomination de «compagnes
» appliquée aux dix cornes indique que les dix États existent simultanément ; l'Antéchrist, onzième corne, a surgi et grandi au milieu d'eux, et il vient d'en abattre trois.

S'il est dit par l'Ange qu'un autre s'élèvera après eux, l'expression «après eux» ne signifie pas que l'Antéchrist n'apparaîtra qu'après la disparition des dix rois ou des dix États, puisque, d'après le verset 8 (cinquième certitude), la petite corne (l'Antéchrist) surgit, s'élève au milieu des dix États (des dix cornes), et qu'il vient d'en abattre trois. Que signifie donc l'expression «après eux» ? Elle signifie que le royaume de l'Antéchrist proviendra de la même source que les autres qui l'ont précédé, c'est-à-dire des débris de l'ancien empire romain
(8).
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SEPTIÈME CERTITUDE : L'empire de l'Antéchrist deviendra universel.


«Et la puissance fut donnée à la Bête sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue, sur toute nation.» (APOCALYPSE ,XIII, 7.)

Cette accumulation d'expressions ne laisse aucun doute sur l'universalité de l'empire de l'Antéchrist. Il deviendra, soit par lui-même, soit par ses lieutenants, maître du monde. Ce sera alors la catholicité de l'anti-christianisme en face de la catholicité de l'Église. De même que Notre-Seigneur a mérité de racheter par son sang l'humanité tout entière (9), ainsi l'Antéchrist, par une rage d'opposition et par une permission divine,étendra, pour un temps, son joug de fer et d'impiété sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue et toute nation (10). Les découvertes modernes, qui abrègent le temps et font disparaître les distances, montrent que l'homme de péché ne manquera pas de moyens pour arriver à cette domination. À la facilité des communications, il joindra à son service la puissance dite scientifique, avec tout ce qu'on y mêle d'anti-rationnel et d'anti-chrétien. Centralisant aussi les forces de l'esprit révolutionnaire, il entraînera les foules qui ne sont que trop souvent prêtes à aller au devant de toutes les servitudes. Avec l'appui qu'il trouvera dans les sociétés anti-chrétiennes (11), cet ennemi de JÉSUS-CHRIST pourra former en peu de temps un empire gigantesque.C'est alors que se réaliseront dans leur entière plénitude ces expressions de l'ÉPÎTRE AUX THESSALONICIENS Revelabitur ille iniquus  : , Cet impie se manifestera ; il sera en évidence, sa puissance éclatant d'une façon mondiale.
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HUITIÈME CERTITUDE : L'Antéchrist fera une guerre acharnée à DIEU et à l'Église




«Il proférera des paroles contre le TRÈS-HAUT, il opprimera les saints du TRÈS-HAUT, et il pensera qu'il pourra changer les temps et les lois.» (DANIEL VII, 27.)
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«Et elle (la bête) ouvrit la bouche pour blasphémer contre DIEU, pour blasphémer son nom,et son tabernacle, et ceux qui habitent dans le ciel. Et il lui fut donné le pouvoir de faire la guerre aux saints, et de les vaincre.» (APOCALYPSE XIII, 6, 7.)


Lorsqu'on interroge la Tradition et qu'on lui demande de quelle manière s'exercera, d'après ces textes, la persécution de l'Antéchrist, SAINT AUGUSTIN se lève et répond : «La première persécution (celle des CÉSARS) a été violente pour forcer les chrétiens de sacrifier aux idoles, on les proscrivait, on les tourmentait, on les égorgeait. La seconde est insidieuse et hypocrite ; elle existe actuellement : les hérétiques et les faux frères en sont les auteurs. Il en viendra plus tard une autre, plus dangereuse que les précédentes ; car elle joindra la séduction à la violence, c'est la persécution de l'Antéchrist (12)

Tout d'abord, sa haine se tournera contre DIEU lui-même : «Et la Bête ouvrit la bouche pour blasphémer contre DIEU, pour blasphémer son nom, et son tabernacle et ceux qui habitent dans le ciel.» Défense de rendre à DIEU le moindre culte, défense d'en prononcer le nom, défense de communiquer avec l'Église, son vivant tabernacle, défense d'honorer les saints du ciel. Mais, par contre, liberté du blasphème contre DIEU, liberté du blasphème contre son nom, liberté du blasphème contre l'Église, liberté du blasphème contre les saints du ciel ! Mais, parmi tous ces blasphèmes, ceux proférés par l'Antéchrist, provoqueront un enthousiasme indescriptible. D'un bout du monde à l'autre, on les colportera, on les répétera ! «Qui est semblable à la Bête» ! Tel sera le cri de triomphe, d'impiété et d'orgie qui ébranlera les airs ! Cri sauvage constituant le plus grand blasphème dont les hommes se seront rendus coupables, puisqu'il supposera que tout ce qui existe et qui vient de DIEU sera inférieur à la Bête, porte-parole de Lucifer (13).

Et, à côté de ces attentats contre DIEU, oppression de l'Église, oppression de tous ceux qui voudront demeurer fidèles au CHRIST (14). Contre eux toutes sortes de mesures iniques. En voici quelques-unes :

Proscription de tout enseignement chrétien. Plus de neutralité, mais proscription ! Défense absolue d'enseigner les vérités chrétiennes et, par conséquent, suppression des écoles, fermeture des églises, interdit de la prédication. Exclusion même d'un enseignement quelconque. Déjà, sous JULIEN L'APOSTAT, il s'est fait un essai de cette inique mesure. «Alors, rapporte SAINT GRÉGOIRE DE NAZIANZE, on dépouilla les églises, et leurs richesses furent transportées dans les temples des idoles qu'on réparait aux frais des chrétiens. Alors on ferma les écoles, et défense fut faite aux chrétiens d'enseigner la grammaire, la rhétorique, la médecine et les arts libéraux. Convient-il, disait en ricanant l'empereur JULIEN, que les adorateurs du vrai DIEU cultivent les muses et la littérature païenne, eux qui estiment nos divinités infâmes et notre science impie (15)

Autre mesure inique : Lacération, et destruction des Livres Saints. On fera plus que de proscrire les ouvrages où se rencontre le nom de DIEU, ainsi qu'on le pratique déjà ; on poursuivra sur tout les Livres Saints, pour les lacérer et les détruire. Ainsi en fut-il, aux temps passés, durant la dure persécution d'ANTIOCHUS ÉPIPHANE, pronostic, au témoignage de SAINT JÉRÔME, de celle de l'Antéchrist (16).

On vit alors, ainsi que le rapporte le PREMIER LIVRE DES MACCHABÉES, toute une armée de fonctionnaires et de sbires occupés à envahir les maisons, à en fouiller les recoins. «On jetait au feu les livres de la Loi de DIEU, après les avoir déchirés. Et ceux chez qui l'on trouvait les livres de l'alliance du seigneur, étaient mis à mort selon l'édit du roi (17).» Alors aussi, d'après un autre passage du même livre, des troupes d'Hébreux fidèles abandonnèrent JÉRUSALEM, pour se réfugier dans les montagnes, au plus profond des cavernes. Les infortunés ! Ils avaient, pour sauver leur vie, tout quitté, sauf quelques feuillets de ces livres, disputés à la flamme, et empourprés du sang des martyrs. Mourants de faim et de froid, mais pressés autour de ces feuillets, ils les lisaient, pour relever leur âme, à la lueur vacillante de torches moins pâles que leurs visages. Mais il arriva que ces cavernes de JUDÉE s'illuminèrent, comme plus tard les catacombes romaines, de telles flammes divines et de tels transports, que, bien des années après la persécution, JONATHAS
MACCHABÉE, l'un des survivants de ces luttes héroïques, pouvait répondre aux Spartiates, qui lui avaient proposé une alliance : «Nous n'avons nul besoin de consolations humaines ; notre consolation ce sont les Livres Saints qui se trouvent entre nos mains (18)

Encore une mesure inique : Enseignement obligatoire et universel de l'erreur. Il y en a comme une préparation dans les écoles sans DIEU, ou plutôt contre DIEU. Généralisées au temps de l'Antéchrist, elles poseront leur main de fer, pour les plier à l'apostasie, non seulement sur les jeunes gens et les jeunes filles, mais encore sur des enfants incapables de se défendre, au mépris des protestations des pères et des larmes de leurs mères !

Sous l'étreinte oppressive de ces mesures iniques et d'autres encore, verrait-on s'accomplir à la lettre l'une des paroles les plus formidables de la Sainte Écriture : «La vérité sera renversée à terre,
Prosternetur veritas in terra (19) ?» Dans la longue suite des tentatives de l'homme depuis l'origine des siècles, on a bien vu la vérité diminuée, bafouée, défigurée, mais renversée à terre, jamais ! Le serait-elle au temps de l'Antéchrist ? Qu'on se garde bien de le croire! Si le prophète DANIEL s'est servi de cette expression, ç'a été pour peindre d'une manière énergique tout ce qu'il y aurait de fureur dans la persécution d'ANTIOCHUS, et tout ce qu'il y aura de fureur dans celle de l'Antéchrist. Il emploie le même langage, lorsque, parlant des épreuves auxquelles les chrétiens fidèles seront en butte, il annonce que ; «la corne fera la guerre aux saints et l'emportera sur eux (20)».Oui, assauts contre les chrétiens, assauts contre la vérité chrétienne ! Mais tandis que les saints, assaillis et meurtris dans leur corps, tiendront tête dans l'indépendance et la fermeté de leur âme, la vérité chrétienne, mieux enracinée au sein de l'Église que ne le sont les montagnes dans les entrailles de la terre,verra se briser tous ces assauts ; et les arrière-descendants de nos contemporains rediront comme nous, chaque dimanche, à l'heure du chant des vêpres, ce verset des psaumes, qui proclame d'avance l'issue de toutes les batailles de DIEU : «Veritas Domini manet in æternum , la vérité du Seigneur demeure éternellement (21)

Mais, parmi les textes qui annoncent la guerre incessante que l'Antéchrist fera à DIEU et à l'Église, il en est un qu'il importe de ne pas laisser sans explication : «Et il pensera, dit DANIEL, qu'il pourra changer les temps et les lois.» Que faut-il entendre par cette annonce ? Elle apprend que l'Antéchrist s'arrogera une puissance surhumaine, car il n'appartient qu'à DIEU, le souverain législateur, de régler et de changer les temps. L'homme de péché voudra renverser toutes les institutions les plus sacrées, tous les fondements de la religion et de la société. Il y a déjà eu comme un essai de la part de ses précurseurs. MAHOMET a changé les jours de fêtes et la Loi en publiant le CORAN. De même, aux jours néfastes de la tyrannie jacobine, en 1792, le culte catholique fut interdit en FRANCE, et le compte du temps modifié par l'introduction d'un nouveau calendrier. Aux saints de chaque jour, dont les noms furent effacés, on fit succéder des légumes, des animaux, la carotte et même le porc... Mais à quoi bon rappeler le passé ? Le présent n'est-il pas suffisamment instructif et menaçant ? N'est-ce pas au sein du Parlement d'une grande nation européenne qu'on a osé proposer naguère l'amendement suivant, afin qu'il fût érigé en loi : «Les quatre fêtes dites concordataires établies sous un vocable religieux s'appelleront à partir de la promulgation de la présente loi : celle de l'ASCENSION, fête des Fleurs ; celle de l'ASSOMPTION, fête des Moissons ; celle de la TOUSSAINT, fête du Souvenir ; celle de NOËL ou de la NATIVITÉ, fête de la Famille (22)». Le motif allégué par l'auteur de l'amendement n'était autre que celui-ci : «Le christianisme a fait disparaître toutes les fêtes de l'antiquité...» Les fêtes païennes avaient au moins un mérite, c'était d'idéaliser la vie, de l'exalter, de la célébrer. Le christianisme a voulu mettre toujours entre l'homme et la nature son DIEU». C'est par 356 voix contre 195 que l'amendement proposé a été repoussé. S'il est repris au temps de l'homme néfaste, qui pensera qu'il pourra changer les temps et les lois, il obtiendra une majorité.

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Mais voici l'abomination des abominations
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NEUVIÈME CERTITUDE : L'Antéchrist se fera lui-même passer pour DIEU, il voudra être adoré lui seul.


«L'adversaire qui s'élève au-dessus de tout ce qui est appelé DIEU, ou qui est adoré, jusqu'à s'asseoir dans le temple de DIEU, se faisant lui-même passer pour DIEU» (II THESSALONICIENS II, 4.) 
«Et ils adorèrent la Bête.» (APOCALYPSE XIII, 4.)

Les paroles «L'adversaire qui s'élève au-dessus de tout ce qui est appelé DIEU, ou qui est adoré», jettent l'esprit dans la stupéfaction. Elles révèlent d'abord que l'homme d'iniquité voudra être adoré, et adoré lui seul. Lorsque le plus beau des anges détourna ses yeux de la face du Seigneur et les porta sur lui-même, ébloui, enivré de sa propre beauté, il osa bien prétendre à l'adoration, mais pas à l'exclusion de DIEU : «Je monterai au ciel, se disait-il en son cœur, j'établirai mon trône au-dessus des astres, je m'assiérai sur la montagne de l'alliance, je serai semblable au TRÈS-HAUT (23)». L'Antéchrist sera plus sacrilège que Lucifer. Excité par lui, il ne tentera pas seulement d'égaler DIEU, de s'asseoir à ses côtés sur le sommet des nues ; il prétendra même le remplacer et être adoré lui seul. Il persuadera les hommes que lui seul est le vrai DIEU et qu'en dehors de lui il n'en existe pas d'autre. La formule incommunicable que DIEU s'est réservée de tout temps : «Je suis le Seigneur, et il n'y en a pas d'autre (24)», l'Antéchrist se l'appropriera (25).

La conséquence de cette prétention inimaginable sera, le texte l'indique, que l'homme d'iniquité ne fera pas seulement la guerre au vrai DIEU et à la vraie religion, mais à tous les cultes existants. II y a eu comme une ébauche de cet avenir dans une particularité de la persécution d'ANTIOCHUS ÉPIPHANE. Ce prince impie, dont il avait été prophétisé qu'il s'élèverait et se grandirait contre tout DIEU (26), ne craignit pas, en effet, de prendre sur ses monnaies le nom de DIEU, et d'ordonner à tous ses sujets de pratiquer sa propre religion (27). Chose digne de remarque : toutes les fausses religions de son royaume se soumirent immédiatement à cet édit, sans l'ombre même d'une résistance : «Toutes les nations consentirent à cet ordre du roi ANTIOCHUS (28)». Et cependant elles n'étaient pas en petit nombre ces fausses religions, puisque le royaume de SYRIE, borné au nord par l'ASIE MINEURE, au midi par l'ÉGYPTE, à l'est par l'empire des PARTHES, à l'ouest par la Méditerranée, embrassait, dans sa vaste étendue, tous les faux dieux de la MÉSOPOTAMIE, de NINIVE, de SYRIE, d'AMMON, de MOAB, de SAMARIE, d'une partie de l'ARABIE, de l'IDUMÉE, du pays des Philistins. Et néanmoins, pas l'ombre même d'une protestation : Toutes les notions consentirent... C'est que le sort de l'erreur, et cela se verra mieux encore au temps du véritable Antéchrist, est de se courber avec empressement sous le regard d'un maître,et de n'avoir à opposer à la plus détestable des tyrannies, celle qui exige l'abdication de la conscience, qu'un silence de vaincu, un silence d'esclave.
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À JÉRUSALEM, il y eut aussi des défections. Nombre de juifs eurent la lâcheté de se soumettre. Mais la majeure partie de la nation demeura fidèle au vrai DIEU. Comme sous le coup d'une commotion soudaine, la foi endormie se réveilla, se dressant calme et intrépide en face du tyran des consciences.

C'est alors que s'ouvrit le martyrologe de la Synagogue, où vinrent s'inscrire, en tête de milliers de victimes, les noms inoubliables du saint vieillard
ÉLÉAZAR, des SEPT MACCHABÉES et de leur mère (29). Durant trois ans et demi, ce martyrologe demeura ouvert...

L'édit d'ANTIOCHUS, qui prescrivait l'unité de culte dans tout le royaume SYRIEN, avait été suivi d'un second édit, spécial à ISRËL, c'est-à-dire à la vraie religion. Combien sa teneur n'est-elle pas instructive, par rapport au présent, et surtout à l'avenir ! Aussi mérite-t-il d'être mise en relief :

* Défense d'offrir dans le temple de DIEU des holocaustes, des sacrifices d'actions de grâces et des sacrifices expiatoires.

* Défense de célébrer le Sabbat et les fêtes solennelles.

* On souillera les Lieux saints et le peuple saint d'ISRAËL

* On bâtira des autels et des temples aux idoles, et on sacrifiera devant elles de la chair de pourceau et des bêtes immondes.

* On ne pratiquera plus la circoncision.

* On flétrira l'âme des enfants par toutes sortes de souillures et d'abominations, en sorte qu'ils oublient la Loi et en changent toutes les ordonnances.

* Et quiconque n'agira pas selon la volonté du roi ANTIOCHUS sera puni de mort (30)
Si monstrueuses que paraissent ces ordonnances, elles seront cependant dépassées sous la domination de l'Antéchrist, puisqu'il y aura obligation pour tous d'adorer sa personne (31). L'auteur inspiré de l'APOCALYPSE, qui a aperçu de loin cette adoration, en a frémi et a poussé ce cri d'horreur : Et ils adorèrent la Bête ! (32). Ce sera, en effet, le détournement et la profanation, aux pieds du suppôt de Satan, de ce beau texte des Écritures consacré au vrai DIEU : «Le travail de l'ÉGYPTE, le trafic de l'ÉTHIOPIE, et les Sabéens à la taille élevée passeront chez toi, et ils seront à toi : ils marcheront à ta suite, ils viendront les fers aux mains, ils se prosterneront devant toi, et ils te supplieront en disant : Il n'y a de DIEU que chez toi, et hors de toi, il n'y a pas de DIEU (33).» L'APOCALYPSE ajoute un dernier trait : Conjointement à cette adoration de la Bête, il y aura aussi l'adoration du Dragon, de Satan : «Et ils adorèrent le Dragon qui avait donné puissance à la bête (34)». L'adoration de Satan ! N'est-ce pas ce qui, dans les antres ténébreux de certaines LOGES MAÇONNIQUES, se pratique déjà ?
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DIXIÈME CERTITUDE : C'est au moyen de prodiges diaboliques que l'Antéchrist prétendra démontrer qu'il est DIEU.


«L'avènement de cet impie aura lieu selon la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs.»(II THESSALONICIENS II,9.)

C'est par des miracles aussi nombreux qu'éclatants, que JÉSUS-CHRIST avait prouvé sa filiation et sa mission divines. «Les œuvres que mon PÈRE m'a données d'accomplir, ces œuvres que j'opère, rendent témoignage de moi, et prouvent que c'est le PÈRE céleste qui m'a envoyé
(35)» ; l'Antéchrist aura la prétention d'établir également sa fausse divinité sur des prodiges extérieurs. C'est avec l'aide de Satan, par sa puissance, qu'il les accomplira.

Mais ces miracles seront-ils réels ?

«On demande souvent, dit SAINT AUGUSTIN, si ces expressions de «signes ou prodiges trompeurs» veulent faire entendre l'inanité des prodiges dont l'Antéchrist abusera les sens de l'homme, toutes ces œuvres n'étant qu'apparentes ; ou bien est-ce à dire que la vérité même de ces miracles entraînera au mensonge ceux qui croiront y voir la présence de la force divine ?» Et l'illustre docteur répond : «on le saura plus tard
(36)».

Cet embarras a déterminé deux courants d'opinions. Les uns pensent que les miracles, accomplis par l'Antéchrist avec la puissance de Satan, seront réels, de vrais miracles et qu'ils entraîneront au mensonge, c'est-à-dire à la croyance de la divinité de l'Antéchrist
(37).

Les autres estiment que tous les miracles de l'Antéchrist seront mensongers, le démon illusionnant les sens de ses adeptes
(38).
Quel que soit le sentiment que l'on adopte, ce qu'il y a de certain, c'est que les prodiges accomplis par l'homme de péché, seront considérables, les mots accumulés de «miracles, signes, prodiges» marquant une multiplicité étonnante.
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ONZIÈME CERTITUDE : La domination et la persécution de l'Antéchrist seront passagères. L'homme de péché sera détruit.
 
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«Le jugement se tiendra, afin que la puissance lui soit enlevée, qu'il soit détruit et qu'il disparaisse à jamais.» (DANIEL VII, 26.)
«Et la Bête fut saisie...» (APOCALYPSE XIX, 20.)
«... Cet impie que le Seigneur JÉSUS tuera par le souffle de sa bouche, et qu'il détruira par la lueur de son avènement.» (II THESSALONICIENS II, 8.)

Après de si dures épreuves, voici enfin l'annonce consolante : L'Antéchrist, après être arrivé peu à peu au faîte du pouvoir, sera subitement et à jamais renversé. «Et la Bête fut saisie...» la victoire sera facile autant que prompte. Ce ne sera pas, en effet, par un grand acte de puissance divine que l'impie aura été détruit. Le souffle de JÉSUS et la première lueur de son second avènement auront suffi pour renverser à jamais le fils de perdition, l'homme abominable, invincible en apparence.

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À quelle époque de son règne néfaste, la chute s'accomplira-t-elle ? Nous ne tarderons pas à l'indiquer, car c'est une certitude qu'elle s'accomplira...Un jour, alors que la persécution d'ANTIOCHUS ÉPIPHANE s'était quelque peu ralentie, un char soulevant des tourbillons de poussière, se dirigeait au triple galop des chevaux, sur la route d'Ecbatane à BABYLONE, dans la direction de JÉRUSALEM. Irrité de ce que le sang des martyrs ne coulait plus à flots, un homme, assis dans ce char, ne cessait d'en presser, par d'exécrables blasphèmes, la course vertigineuse : «Marche donc, hurlait-il à tout instant au conducteur de ses chevaux, ne sais-tu pas que j'ai hâte d'arriver à JÉRUSALEM ! Je veux en faire le tombeau des Juifs ; je livrerai leurs cadavres aux oiseaux duciel et aux bêtes féroces ; j'exterminerai jusqu'aux plus petits enfants (39)»... Et des étincelles moins brûlantes que l'animosité de l'homme assis dans le char (40), volaient sous les pieds des chevaux ; et, dans cette course d'enfer, arbres, maisons, collines, disparaissaient comme des ombres... Or, voici que, tout à coup, un craquement sinistre se fait entendre. Du ciel, la vengeance divine s'est appesantie. L'homme impie a roulé de son char. De ses membres brisés et de ses chairs pantelantes s'échappe, au travers de milliers de vers, une telle puanteur que, de l'armée, qui se pressait à sa suite, personne ne veut transporter cet ANTÉCHRIST DE L'ANCIEN TESTAMENT (41).

C'était lui, en effet, ANTIOCHUS ! Et le rôle que lui assignait la permission divine était fini.


Il avait, par sa persécution, ravivé la foi et le courage des élus dont la robe s'était blanchie dans le sang du martyre.


Il avait courbé et écrasé sous son pied de fer toutes les fausses religions et tous les apostats
(42).



Lui-même, le plus apostat et le plus scélérat de tous (43), il était brisé sans main d'homme ainsi que l'avait prophétisé DANIEL (44).
Mais
JÉRUSALEM était debout ! Sous ses remparts retentissaient les trompettes victorieuses des MACCHABÉES...

Quelque chose de plus rapide et de plus saisissant s'accomplira contre le véritable Antéchrist, celui du NOUVEAU TESTAMENT. Un simple souffle de la bouche du CHRIST le tuera, la première lueur de son avènement le détruira. Comme on voit, au crépuscule, les ténèbres s'enfuir avant l'apparition du soleil, ainsi à l'approche du Soleil de justice, avant même l'éblouissement du second avènement, sans aucun effort du CHRIST, la Corne aura été arrachée, la Bête aura disparu, l'Homme d'iniquité aura été détruit.
 
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(1) «Recapitulatio universe iniquitatis ». (Irenæus. Advers. Hæres.I.V. XXIX.)
(2) SAINT MATTHIEU XXIV, 21.
(3) RENAN. l'Antéchrist, Paris 1873. p. 478. 479
(4) Cathec. Conc. Trid. P. I art. VII. n. VIII :
signa judicium præcedentia. - «Dicendum est Antichristum futurum esse verum hominem. Existimo esse assertio nem certam de fide » (SUAREZ De Antichristo. Sect, I,n°4 ; Edit. Vivès, t.XIX, Paris. 1860.)
(5) «
Dicendum est, Antichristum non solum futurum verum hominen, sed etiam veram humanam, propriam, et connaturalem humanitati ; itaque non erit persona dæmoni sin carnata. » (Suarez, De Antich., Sect. I, n°5.) - S. Thom. Sum. theol. P.IIIa,,q.8, a.8. « Erit homo (non dæmon incarnatus, ut quidam Scholastici opina tisunt) ; sed homo pessimus » (VAN STEENKISTE Pauli Epistolæ, t.II, p.276.)
(6)
SAINT MATTHIEU XXIV, 24
(7) «Est certum Antichristum non habiturum aliquod regnum Jure hæreditario, sed habiturum potius humilem originem, et paulatim ac fraudulenter regnum occupaturum». (Suarez, De -Antichr., sect. V, n°2)
«Vocatur cornu parvulum, quod sensim crescet, quodque non hæreditate, sed fraude regnum obtinebit
» (Corn. a Lap., in IIa Ep. ad Thess.,II, edit.Vivès, t. XIX.)
(8)
Antichristum futurum esse regem magnumque monarcham aperte colligitur ex Daniel, VII, supposita communi interpretatione Santorum, qui de Antichristo ea loca ontelligunt. Cap. enim VII explicatur, cornu illud parvulum, quod Antichristum significare diximus ÎÎs verbis : «Cornuadecem, decem regeserunt, et alius consurget post eos, et ipse potentior erit prioribus, et tres reges humiliabit.» Erit ergo absque ulla dunitatione Antichristus rex temporalis  (SUAREZ, De Antich., sec. V, n°1).
(9) APOCALYPSE, V, 19
(10)
«
Cum dicitur regnaturus in universo orbe, non est necesse intelligi de omnibus provinciis mundi ; sed de Romano imperio veteri, atque de iisprovinciis Asiæ, Africæ et Europæ, in quibus fides et Ecclesia diutius viguit.Præterea, etiam si priori modo intelligatur, non erit factu difficile, præsertimcum neque copia auri et argenti, neque dæmonum industria de futura sit.»(SUAREZ, De Antich., sect. V, n°4). - Cfr. Corn. a Lap., II epist. in THESSALONICIENS, II ; édit. Vivès, t. XIX, p. 162.
(11) Un écrivain de premier mérite, DONOSO CORT
ÈS, a eu comme une intuition de cet empire néfaste, dans les projets actuels de la démagogie : «...De là ces aspirations immenses à la domination universelle par la future démagogie, qui s'étendra sur tous les continents et jusqu'aux dernières limites de la terre ; de là ces projets d'une folie furieuse, qui prétend mêler et confondre toutes les familles, toutes les classes, tous les peuples, toutes les races d'hommes, pour les broyer ensemble dans le grand mortier de la révolution, afin que de ce sombre et sanglant chaos sorte un jour le dieu unique, vainqueur de tout ce qui est divers ; le dieu universel, vainqueur de tout ce qui est particulier ; le dieu éternel, sans commencement ni fin, vainqueur de tout ce qui naît et passe ; le dieu Démagogie annoncé par les derniers prophètes, astre unique du firmament futur, qui apparaîtra porté par la tempête, couronné d'éclairs et servi par les ouragans. La démagogie est le grand Tout, le vrai dieu, dieu armé d'un seul attribut, l'omnipotence, et affranchi de la bonté, de la miséricorde, de l'amour, ces trois grandes faiblesses du DIEU catholique. À ces traits, qui ne reconnaîtrait le dieu d'orgeuil, Lucifer ?
«Quand on considère attentivement ces abominables doctrines, il semble impossible de ne pas y voir quelque chose du signe mystérieux, mais visible, dont l'erreur sera marquée aux temps annoncés par l'APOCALYPSE. Si une crainte religieuse n'empêchait pas de chercher à soulever le voile qui couvre ces temps redoutables, je pourrais peut-être appuyer sur de puissantes raisons d'analogie cette opinion : que le grand empire antichrétien sera un empire démagogique colossal, gouverné par un plébéien de grandeur satanique, l'homme du péché.» (DONOSO CORT
ÈS, oeuvres, t. II, p.229-230)
(12) SAINT AUGUSTIN Enarrat in Psalm., IX, n°27
(13) N'y a-t-il pas comme une préface aux blasphèmes de l'Antéchrist dans ceux qu'entend et supporte la société contemporaine. «Le premier devoir de l'homme intelligent, a osé dire PROUDHOM, est de chasser incessamment l'idée de DIEU de son esprit et de sa conscience ; car DIEU, s'il existe, est essentiellement hostile à notre nature...DIEU, c'est sottise et lâcheté ; DIEU, c'est hypocrisie et mensonge ; DIEU, c'est tyrannie et misère ; DIEU, c'est le mal. » (Système des contradictions, chap. VIII, t.I, p.382. - 2e édit.)
(14) «
Certum est Antichristum persecuturum esse Ecclesiam, et fideles, acsantos acerbius et crudelius quam ab ullo unquam tyranno tentati ant afflicti fuerint. Hoc de fide est... Secundo dicendum est persecutionem hanc non tantum futuram esse temporalem, sed etiam spiritualem» (SUAREZ, De Antichr., sect.VI, nos 1 et 2)
(15) GRÉGOIRE DE NAZIANZE, Oratio 1a in Julianum.
(16) «
Hunc locum plerique nostrorum ad Antichristum referunt, et quod sub Antiocho in typo factum est, sub illo in veritate dicunt esse complendum... sicut igitur salvator habet et salomonem et cæteros sanctos in typum adventùssui ; sic et Antichristus pessimum regem Antiochum, qui sanctos persecutus est, templumque violavit, rectè typum sui habuisse credendus est» (HI
ÉRONYME, Comment. in DANIEL, cap. VIII, 14 ; cap. XI, 21.)
(17) I MACCHABÉES I, 59,60.
(18)
I MACCHABÉES II, 28-30 ; XII, 8,9, 13, 14. 15.- JOSÈPHE Antiq.,liv. XII. c.VI.

(19) DANIEL VIII, 12.
(20) DANIEL VII, 21.
(21) PSAUME CXVI, 2.
(22)
Amendement proposé par Monsieur G
ÉRAULT-RICHARD à la CHAMBRE DES DÉPUTÉS dans la séance du 2 juillet 1905.
(23) lSAÏE XIV, 14.
(24)
id., XLV, 5,6,18,22.
(25) «
Dicendum est Antichristum docturum ac persuasurum hominibus, ut credant nullum esse verum Deum præter seipsum ; verisimile aute mest non esse hocdocturum, donec rerum omnium poliatur» (SUAREZ, De Antichr., sect. IV,n° 4.)
(26) DANIEL XI, 36.
(27) I MACCHABÉES I, 43 ; DIODORE DE SICILE XXXI, 1 ; Polybe, XXXI, 4, etc.
(28)
MACCHABÉES I, 44.
(29) II MACCHABÉES ch. VI et VII.
(30) I MACCHABÉES I, 46-52 - JOSÈPHE, Antiq. Liv. XII. ch. V. n°IV.
(31) APOCALYPSE, XIII. 12, 15.
(32)
Id., XIII, 4.
(33) ISAÏE XLV, 14.
(34) APOCALYPSE XIII.
(35) 
SAINT JEAN V. 36.
(36) SAINT AUGUSTIN, La cité de DIEU, liv. XX, n° XX.
(37) SUAREZ, De Antichristo, sect. IV, n°10
(38) Bern. a Picono, II
ÉPÎTRE AUX THESSALONICIENS, ch. II, 9.- Corn. a Lap., II THESSALONICIENS, II, 9.
(39) «ANTIOCHUS, transporté de colère... ordonna de conduire rapidement son char et de voyager sans délai, poursuivi par la vengeance céleste, parce qu'il avait dit avec orgueil qu'il irait à JÉRUSALEM et qu'il ferait d'elle le tombeau des Juifs...Il avait dit qu'il les livrerait en proie aux oiseaux et aux bêtes sauvages, et qu'il exterminerait jusqu'aux petits enfants.»(II MACCHABÉES, IX, 4,15)
(40) «Aspirant du feu contre les Juifs, dans ses pensées, il ordonna d'accélérer le voyage.» (id., IX, 7.)
(41) II MACCHABÉES IX, 7-9
(42) I MACCHABÉES I, 44, 45.
(43) II MACCHABÉES IX, 13,28.
(44) DANIEL VIII, 25
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L'ANTÉCHRIST par AUGUSTIN LÉMANN (2)

L’NTÉCHRIST
par AUGUSTIN LÉMANN (2)
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CHAPITRE DEUXIÈME (SUITE)
Trois portraits de l'Antéchrist tracés prophétiquement dans la Bible.

II - CHOSES PROBABLES

PREMIÈRE PROBABILITÉ Les Juifs acclameront l'Antéchrist comme Messie et seront ses auxiliaires pour établir son règne.


«Je suis venu au nom de mon PÈRE, et vous ne m'avez pas reçu ; un autre viendra en son nom et vous le recevrez.» (SAINT JEAN V, 43.)

C'est sur cette parole adressée par JÉSUS-CHRIST aux Juifs, ses contemporains et ses adversaires, que cette croyance s'est établie ; et l'on peut dire qu'elle est le sentiment commun des Pères de l'Église. Nommons SAINT IRÉNÉE, SAINT HIPPOLYTE, SAINT HILAIRE, SAINT CYRILLE DE JÉRUSALEM, SAINT GRÉGOIRE DE NAZIANZE, SAINT ÉPHREM, SAINT AMBROISE, RUFIN, SAINT JEROME, SAINT CHRYSOSTOME, SAINT PROSPER, SAINT CYRILLE d'ALEXANDRIE, THÉODORET, VICTORINUS, SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, ANDRÉ DE CESARÉE, le VÉNÉRABLE BÈDE, SAINT JEAN DAMASCÈNE, THÉOPHYLACTE, SAINT ANSELME, etc.

Qu'il suffise de citer les plus en renom :

SAINT JÉRÔME : «Le Seigneur parlant de l'Antéchrist dit aux Juifs : Je suis venu au nom de mon PÈRE, et vous n'avez pas cru en moi ; un autre viendra en son nom, et vous le recevrez »... Les Juifs, après avoir méprisé la vérité en la personne de JÉSUS-CHRIST, recevront le mensonge, en recevant l'Antéchrist (1)».

SAINT CHRYSOSTOME : «Qui est celui que le Sauveur annonce comme devant venir, mais pas au nom de son PÈRE ? L'Antéchrist et il dénonce d'une manière évidente la perfidie des Juifs (2)».

SAINT AMBROISE : «Cela montre que les Juifs, qui n'ont pas voulu croire en JÉSUS-CHRIST, croiront à l'Antéchrist (3)».


SAINT ÉPHREM : «C'est d'une manière exceptionnelle que l'Antéchrist entourera de faveurs la nation Juive. Mais c'est aussi d'honneurs extraordinaires que la nation déicide le couvrira et qu'elle applaudira son règne (4)».

SAINT GRÉGOIRE LE GRAND : «Les Juifs accorderont leur confiance à un homme, eux qui refusent de croire au Rédempteur, alors qu'à la fin du monde ils se donneront à l'Antéchrist (5)».


SAINT JEAN DAMASCÈNE : «Les Juifs ont donc rejeté le Seigneur JÉSUS, CHRIST et DIEU, et FILS de DIEU ; ils recevront au contraire l'imposteur qui s'attribuera avec arrogance la divinité (6)».

SAINT HIPPOLYTE : disciple de SAINT IRÉNÉE et l'un des premiers qui ait écrit sur ce sujet, fait même parler les Juifs : «Ils se diront les uns les autres : «Se trouve-t-il dans notre génération un homme aussi bon et aussi juste ? » Ils iront à lui et ils lui diront : «Nous te servirons tous ; nous plaçons en toi notre confiance ; nous te reconnaissons comme le plus juste de toute la terre ; c'est de toi que nous espérons le salut. Et ils le proclameront Roi (7)».

Tout étonnement cesse devant ces commentaires et ces annonces tombant de haut, lorsque surtout on voit s'accroître chaque jour l'énorme puissance financière des Juifs, leurs intrigues, l'escalade qu'ils font des premières places dans les principaux États, leur entente d'un bout du monde à l'autre. En présence d'une telle prépondérance, on n'a plus de peine à comprendre et à admettre comment ils pourront contribuer à l'établissement de la formidable puissance de l'Antéchrist.

Cette acclamation de sa personne et l'aide qu'ils lui apporteront sont donc choses probables. Mais pourquoi pas certaines ?

En voici la raison :

La plupart des témoignages patristiques, relatés ci-dessus, reposent sur cette parole de JÉSUS-CHRIST, adressée par lui aux Juifs : «Je suis venu au nom de mon PÈRE, et vous ne m'avez pas reçu, un autre viendra en son nom, et vous le recevrez (8). Or, à propos de ce texte, SAINT THOMAS D'AQUIN observe que, depuis le vrai CHRIST, un grand nombre de faux CHRISTS ayant déjà paru chez les Juifs et ayant été reçus par eux (9), il se pourrait que le texte, considéré en lui-même, se rapportât non à l'Antéchrist, mais à n'importe lequel de ces faux Messies, de ces faux CHRISTS. Cependant, ajoute SAINT THOMAS, ce texte peut être probablement reçu selon le sens relatif à l'Antéchrist, à cause de l'autorité des saints Pères qui l'ont entendu ainsi : «Locus probabilis est propter auctoritatem sanctorum Patrum
(10)».
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DEUXIÈME PROBABILITÉ : La durée de la persécution de l'Antéchrist sera de trois ans et demi.


«Les saints seront livrés entre ses mains pendant un temps et des temps et la moitié d'un temps.» (DANIEL VII, 25) «Et le Pouvoir fut donné à la Bête d'agir pendant quarante-deux mois.» (APOCALYPSE XII, 5.)
 
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Il a été dit précédemment (IIè certitude) que la puissance et la persécution de l'Antéchrist ne seraient que passagères. Cela est certain. Mais serait-il possible d'en déterminer exactement la durée ? On ne peut faire, à cet égard, qu'une réponse probable, non certaine, d'après les deux textes cités. Celui de DANIEL, en effet, est mystérieux : il ne précise que trois temps et demi, sans déterminer ce qu'il faut entendre par ces expressions qui peuvent signifier une période de jours, de mois, d'années, de siècles. De nombreux commentateurs anciens (SAINT ÉPHREM, SAINT JÉRÔME, THÉODORET, etc.), modernes et contemporains, supposent qu'un «temps» correspond à une année. Ils ont raison. Grâce, en effet, au texte de l'APOCALYPSE, celui de DANIEL est éclairci. En prédisant que la domination de l'Antéchrist ne durera que quarante-deux mois, l'APOCALYPSE autorise à conclure qu' «un temps et des temps et la moitié d'un temps »représentent trois ans et demi, durée équivalant à quarante-deux mois (11).

Une observation ingénieuse a été faite : «Il est à remarquer que DANIEL ne dit pas simplement : trois temps et demi, mais : un temps, deux temps... il divise ainsi l'ère de l'Antéchrist en trois périodes intégrales : l'une relativement courte, durant laquelle l'ennemi de DIEU et des hommes établira sa puissance ; la seconde plus longue, qui le verra exercer son influence néfaste ; la troisième, qui semblait devoir se prolonger davantage encore, sera au contraire très courte, parce que son pouvoir sera tout à, coup brisé par le Seigneur (12)
 

 
III - CHOSES INDÉCISES
Ce sont celles qui ne sont établies ni par le consentement unanime des Pères, ni par des textes précis de la Sainte Écriture.

D'après plusieurs Pères de l'Église, suivis par certains exégètes, l'Antéchrist sortirait de la race juive et, même, de la TRIBU DE DAN.
«C'est ici, objecte BOSSUET, une affaire non de dogme ni d'autorité, mais de conjecture
(13).» Ajoutons que ces conjectures ne reposent sur aucun fondement solide.



1° D'abord par rapport à la race juive. Les raisons alléguées sont les suivantes, auxquelles il sera répondu au fur et à mesure :


a) En annonçant l'Antéchrist, DANIEL l'a représenté sous la forme d'une petite corne. Or, conclut THÉODORET : «DANIEL appelle l'Antéchrist une petite corne, parce qu'il naîtra de la petite tribu des juifs (14)


Réponse : C'est pour marquer la marche grandissante de l'Antéchrist, les développements de son règne que DANIEL le montre d'abord sous le symbole d'une petite corne qui devient ensuite plus grande et plus forte que les autres. (DANIEL VII, 8, 20)
--------------------------------------------------------
b) (DANIEL ch. XI, 2) dit : «succédera un homme méprisé, à qui on n'accordera pas les honneurs royaux ; il viendra en secret, et il s'emparera du royaume par la fraude.»
Explication de SAINT JÉRÔME : (D'après nos commentateurs, cela s'accomplira à la fin du monde par l'Antéchrist, qui doit surgir d'une nation petite, c'est-à-dire du Peuple juif ; ses débuts seront si humbles et il sera si méprisé qu'on ne lui accordera pas les honneurs royaux ; mais il obtiendra le pouvoir par des intrigues et par astuce (15)

Réponse : ce texte, au sens littéral, s'applique non à l'Antéchrist mais à ANTIOCHUS qui l'a réalisé d'une manière exacte. Malgré le surnom d'ÉPIPHANE (L'ILLUSTRE), que lui décerna la flatterie de quelques-uns de ses sujets, Antiochus était en réalité un homme très vil et aux instincts grossiers. Aussi le peuple ne tarda-t-il pas à parodier ce surnom, qu'il transforma en ÉPIMANE (l'INSENSÉ) (16). Qu'en cela ANTIOCHUS ait été la figure de l'Antéchrist, qui réaliserait plus tard l'interprétation rapportée par SAINT JÉRÔME, c'est possible, mais la chose reste indécise.
--------------------------------------------------------
c) «Le CHRIST étant né des Hébreux, l'Antéchrist aura la même origine (17).» C'est la raison apportée par SAINT HIPPOLYTE, martyr.

Réponse : Elle n'est qu'une supposition, sous forme d'antithèse.
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d) C'est une opinion admise comme probable que les Juifs acclameront l'Antéchrist comme le MESSIE qu'ils attendent. Or ils ne sauraient le faire, qu'autant que l'Antéchrist sera de même race qu'eux-mêmes, c'est-à-dire d'origine juive. Tel est le raisonnement de MALVENDA (18).

Réponse : À travers les siècles, les Juifs ont acclamé tous les ennemis de JÉSUS-CHRIST et de l'Église, quelle que fut leur origine, et ils se sont faits leurs auxiliaires. Dans le grand SANHÉDRIN, tenu à PARIS en 1807, ils ont couvert le nom de NAPOLÉON de louanges et de fleurs bibliques exclusivement réservées au MESSIE (19), et cependant NAPOLÉON n'était pas de sang juif. Ils ont même reconnu le MESSIE dans les fameux principes de la Révolution française : «Le MESSIE est venu pour nous le 28 février 1790 avec la DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME (20).» À plus forte raison, pourquoi ne le reconnaîtraient-ils pas dans un être extraordinaire, tel que l'Antéchrist, alors même qu'il ne serait pas de leur race ?
---------------------------------------------------------
e) L'Antéchrist doit sortir de la TRIBU DE DAN, l'une des douze tribus d'ISRAËL. Donc il sera d'origine juive.

Réponse : De toutes les raisons alléguées, cette dernière est la plus forte. Il est évident, en effet, que si l'Antéchrist doit être danite par le sang, sa nationalité juive demeure indiscutable. Mais le doit-il être ?
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2° L'Antéchrist descendra-t-il de la TRIBU DE DAN ?

À cette question, les Pères, on doit le reconnaître, répondent, et en assez grand nombre, d'une manière affirmative : L'Antéchrist sera de l'ancienne TRIBU JUIVE DE DAN. Ont partagé cette opinion SAINT IRÉNÉE, SAINT HIPPOLYTE, SAINT AMBROISE, SAINT AUGUSTIN, SAINT POSPER, THÉODORET, SAINT EUCHER, SAINT ANASTASE LE SINAÏTE, SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, SAINT ISODORE, LE VÉNÉRABLE BÈDE, SAINT ANSELME, RUPERT, RICHARD DE SAINT-VICTOR, SAINT ANTONIN, et de non moins nombreux exégètes.


Sur quoi appuient-ils leur sentiment ? Sur les trois textes suivants des Écritures :

a) Sur un passage de la fameuse prophétie de JACOB, où le patriarche mourant découvre l'avenir des douze tribus d'ISRAËL, représentées par ses douze fils. Arrivé à DAN, il s'écrie : «Que DAN devienne comme un serpent dans le chemin, et comme un, céraste dans le sentier, qui mord le pied du cheval, afin que celui qui le monte tombe à la renverse (21)». Le céraste ou le serpent à cornes est un reptile des plus dangereux. Il se cache dans le sable, et s'élance sur le cavalier et sur sa monture. De ces images peu favorables, les Pères susnommés ont conclu que l'Antéchrist appartiendrait à la tribu de DAN.

Réponse : Le sens de cette prophétie est que DAN suppléera par la ruse à ce qui lui manquera en force. La ruse n'est pas méprisée chez les Orientaux, au contraire, elle est aussi estimée que la bravoure. Ce caractère, qui joint à la force la finesse et la ruse, et au besoin supplée par la ruse à la force, paraît déjà dans l'expédition des Danites contre LAÏS
(JUGES XVIII, 28-29) ; mais c'est surtout dans SAMSON, originaire de la tribu de DAN, que cette prophétie a reçu une éclatante réalisation. On sait toutes les embûches que SAMSON dressa aux Philistins. Mais, dans ce texte, il n'y a aucun indice qui autorise à le rapporter à l'Antéchrist, bien que CORNÉLIUS LAPIERRE dise : «JACOB ad litteram hæc prædixit de SAMSONE, allegorice de Antichristo
 (22)
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b) Sur un texte de (JÉRÉMIE VIII, 16) : «Depuis DAN on entend le frémissement de ses coursiers ; tout le pays est ébranlé par les hennissements de ses chevaux de guerre : ils sont venus, et ils ont dévoré le pays et ce qu'il renferme, la ville et ses habitants.»

Réponse : Il s'agit de l'invasion chaldéenne. L'armée de NABUCHODONOSOR est arrivée à DAN, sur la frontière septentrionale de la PALESTINE. Déjà on entend les hennissements de ses chevaux. Et
NABUCHODONOSOR, qui a prêché en vain la pénitence, ajoute : «Ma douleur est au-dessus de toute douleur ; mon cœur est languissant au dedans de moi (23)». C'est donc NABUCHODONOSOR, suscité de DIEU pour être son vengeur, qui est annoncé comme arrivant de DAN, et non l'Antéchrist.
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c) Sur le silence que garde SAINT JEAN par rapport à DAN dans l'énumération qu'il fait des tribus d'Israël, au (chapitre VII de l'APOCALYPSE)


On en a tiré cette conclusion : Puisque toutes les tribus d'Israël, sauf celle de DAN, fournissent leur contingent à la JÉRUSALEM céleste décrite par SAINT JEAN dans ce chapitre, c'est sans doute en haine de l'Antéchrist que la tribu de DAN n'est pas nommée.

Réponse : Le silence de SAINT JEAN, s'il est réel, ne prouve rien, attendu que dans la plupart des énumérations bibliques il y a toujours quelque tribu omise. Ici, c'est LÉVI, (NOMBRES XIII) ; là, c'est SIMÉON, DEUTÉRONOME, XXIII. Du reste, il n'est pas certain que le silence de SAINT JEAN soit réel, et on peut penser avec D. CALMET que cet apôtre n'avait pas omis DAN. Un des premiers copistes, trompé par la similitude du Æ et du M aura lu Mav au lieu de Æav et aura écrit Man., abrégé de MANASSÉ, qui serait ensuite passé dans le texte. L'hypothèse est d'autant plus plausible que la présence de MANASSÉ dans l'énumération de l'APOCALYPSE n'a pas de raison d'être, puisque cette tribu n'est qu'une division de la TRIBU DE JOSEPH, dont le nom est mentionné en cet endroit.

Bien que les trois textes scripturaires allégués pour établir l'origine danite de l'Antéchrist ne soient pas probants, néanmoins il y aurait lieu de tenir compte de l'autorité des Pères qui s'autorisent de ces textes, s'ils les faisaient reposer sur une tradition. Or, tel n'est pas le cas en cette question. Non seulement ils ne mentionnent aucune tradition positive, mais plusieurs se servent d'expressions dubitatives telles que celles-ci : «On pense (existimatur) (24).... Moi je pense (ego arbitror) (25)... Quelques-uns rapportent (nonnuli ferunt) (26)... Il est rapporté (Fertur) (27)... Quelques-uns disent (Dicunt quidam )(28)... etc. À ces expressions qui dénotent des opinions personnelles plutôt qu'une tradition, si on ajoute la non unanimité des Pères, et aussi ce fait historique et indubitable que, depuis bientôt vingt siècles, toutes les tribus d'ISRAËL sont confondues dans un pêle-mêle inextricable et que les généalogies ont péri, on conviendra que l'opinion qui fait sortir l'Antéchrist de la tribu de DAN est bien discutable.

En résumé la nationalité juive de l'Antéchrist reste indécise. Elle n'est ni certaine, ni probable, mais seulement possible : rien de plus. L'événement seul tranchera la question.
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DEUXIÈME CHOSE INDÉCISE : Le nom de l'Antéchrist.
 

SAINT JEAN l'a indiqué, mais d'une manière extrêmement mystérieuse en donnant seulement le chiffre de ce nom : «...Que personne ne puisse acheter ni vendre, s'il n'a la marque ou le nom de la Bête, ou le chiffre de son nom... Que celui qui a de l'intelligence calcule le nombre de la Bête ; car c'est un nombre d'homme, et son nombre est six cent soixante-six.» (APOCALYPSE XIII, 17-18.)

Chez les anciens, et notamment chez les Hébreux, les Grecs et les Latins, on se servait des lettres de l'alphabet en guise de chiffres. Chaque lettre avait ainsi sa valeur numérale. D'où le procédé suivant : En additionnant la valeur numérique des lettres employées dans tel passage, on obtenait un chiffre, et avec les lettres qui représentaient le total, on trouvait un nom. Le nombre de la Bête étant 666, on a donc entrepris de transformer les chiffres de ce nombre en lettres et d'en composer le nom mystérieux de l'Antéchrist. On l'a tenté en grec, en hébreu et en latin. Peine inutile ! Les résultats qu'on a obtenus différent trop, entre eux, pour qu'on puisse y voir rien de précis et de définitif.
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Selon la valeur des lettres grecques, le nom de l'Antéchrist serait l'un des suivants :
 
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Selon la valeur des lettres hébraïques, le nom de l'Antéchrist serait LATINUS (Latin) - NERO CÉSAR - ELION ADONAÏ JÉHOVAH HAKADOS (Altissimus Dominus JEHOVA sanctus (d'après MALVENDA) (29)
 
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Selon la valeur des lettres latines, le nom de l'Antéchrist serait : DIOCLÈS AUGUSTUS (DIOCLÉTIEN), proposé par BOSSUET - CAÏUS CÉSAR (CALIGULA), etc.

De ces divers exemples on peut conclure combien on s'est fatigué en vain pour découvrir le nom de l'homme de péché. Il demeure chose indécise. Au reste, «il est loin d'être sûr qu'il faille chercher un nom propre d'homme, avec ou sans titre de dignité, dans le chiffre 666. Nous sommes ici en face d'une énigme dont l'apôtre SAINT JEAN n'a peut-être jamais révélé le secret à Personne, puisque les commentateurs les plus anciens et SAINT IRÉNÉE lui-même, quoiqu'il eût connu des disciples de SAINT JEAN, n'en ont proposé l'explication qu'avec hésitation et incertitude. Il faudrait des pages entières pour énumérer seulement les personnages que l'on a cru découvrir dans ce nombre. Mais peut-être appartient-il à l'avenir seulement de nous révéler le mot de l'énigme, et quand le vrai Antéchrist aura paru, ce qui est si obscur aujourd'hui sera-t-il alors comme la lumière du jour (30)

On sait que dans la secte des FRANCS-MAÇONS les nombres jouent un grand rôle (31). Chaque grade y est caractérisé par un nombre spécial. Des noms ne le sont-ils pas aussi ? Qui sait ? Ce nombre 666 indique peut-être le numéro et le nom que l'Antéchrist portera parmi les sociétés secrètes qui ne manqueront pas de se presser à sa suite.
 
RECONSTRUCTION DU TEMPLE

TROISIÈME CHOSE INDÉCISE : Le siège de l'empire de l'Antéchrist.
 
Encore deux opinions :
 
1° La première se présente avec SAINT IRÉNÉE qui s'exprime ainsi :
 

«L'Antéchrist, au temps de son règne, transférera le siège de son empire dans la JÉRUSALEM terrestre (32)». 

À la suite de SAINT IRÉNÉE figurent :
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SAINT HIPPOLYTE, SULPICE SÉVÈRE, ANDRÉAS évêque de CÉSARÉE, ARÉTAS, RABANUS, SANDÉRUS, BELLARMIN, BÉCAN, VIEGAS, LESSIUS, FERRERIUS, CORN. A LAPIDE et aussi le docte SUAREZ dont voici les paroles : «Il est à croire que le règne de l'Antéchrist s'établira surtout chez les Juifs, et qu'il restaurera la cité de leurs pères dont ils se sont toujours glorifiés ainsi que de son temple (33)
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Les partisans de cette opinion se fondent :

a) Sur un texte de l'APOCALYPSE qui dit que les deux témoins de DIEU, ÉNOCH et ÉLIE, adversaires de l'Antéchrist, seront mis à mort dans la grande ville où leur Seigneur a été crucifié (34). Ces mots caractérisant JÉRUSALEM, on en conclut que si les deux témoins sont mis à mort dans cette ville, c'est que l'Antéchrist y aura le siège de son empire.

b) Cette opinion se fonde encore sur des raisons de convenance.
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Comme ç'a été en JUDÉE et plus spécialement à JÉRUSALEM que le CHRIST, durant sa vie terrestre, a établi le siège de son empire spirituel ; comme c'est là qu'il est né, qu'il a vécu, prêché, opéré ses miracles, établi l'Évangile ; qu'il y a été crucifié, qu'il y est mort, ressuscité, monté au ciel ; qu'il y a enfanté l'Église ; en un mot, qu'il y a accompli toute l'économie divine préordonnée de toute éternité en vue du salut du genre humain : pour tous ces motifs l'Antéchrist, inspiré par Satan, reviendra, afin de réaliser pleinement sa mission infernale d'adversaire du CHRIST, sur toutes les étapes de la vie du Sauveur, pour les combattre, les effacer, les détruire. Dans ce but, c'est à JÉRUSALEM qu'il fixerait aussi le siège de son empire diabolique.

De plus, si l'Antéchrist agissait autrement, pourrait-il se faire accepter comme MESSIE par les Juifs, qui rêvent une gloire terrestre pour JÉRUSALEM et s'imaginent que cette ville deviendra, dans l'avenir, le siège de l'empire messianique ? Cette dernière raison semble se fortifier, de nos jours, par l'apparition du SIONISME. En voici le programme : «Les temps ne sont-ils pas venus de reconstituer cette nationalité juive pour laquelle, du fond de ses synagogues et de ses ghettos, ISRAËL n'a pas cessé de soupirer ?» Une vaste association s'est donc formée entre les Juifs croyants du monde entier, en vue de récupérer la PALESTINE et JÉRUSALEM. Sept congrès se sont déjà tenus à BÂLE pour en trouver les moyens. Le dernier, du 27 au 30 juillet 1905, a été particulièrement intéressant au point de vue qui nous occupe. S. M. le SULTAN DE CONSTANTINOPLE ne se montrant point favorable aux désirs des Sionistes, l'ANGLETERRE avait gracieusement offert un vaste terrain dans l'OUGANDA, à l'est de l'AFRIQUE CENTRALE, pour y essayer la formation d'un ÉTAT JUIF autonome. Le Congrès, composé de plus de huit cents délégués du Judaïsme mondial, a adopté, à une forte majorité, la résolution suivante : «Le Congrès maintient fermement les principes de son programme tendant à établir une patrie pour le peuple juif en PALESTINE. Il refuse toute colonisation hors de la PALESTINE ou des pays voisins.

«Le Congrès vote des remerciements au gouvernement anglais pour son offre d'un territoire en AFRIQUE ORIENTALE (35)

Serait-ce un acheminement à l'établissement du siège de l'Antéchrist à
JÉRUSALEM, grâce au concours futur des Juifs ?
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2° La deuxième opinion désigne la ROME des Papes comme siège de cet empire, et voici ses arguments :

Reprenant d'abord le texte de SAINT JEAN touchant la mort des deux témoins (36) ÉNOCH et ÉLIE, elle fait remarquer, et avec raison, qu'il n'est pas concluant. Il se pourrait, en effet, que ces deux témoins fussent mis à mort dans JÉRUSALEM par ordre de l'Antéchrist, sans que celui-ci y ait alors le siège de son empire, et même sans qu'il y soit résidant.

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ROME, au contraire, ne semble-t-elle pas indiquée ? C'est là que, pour mieux faire opposition au vrai CHRIST, l'Antéchrist établirait le siège de sa puissance. Il siégerait à ROME redevenue païenne, selon une ancienne tradition (37), et, se posant en face du chef de l'Église, il ressusciterait l'empire romain ou latin. Il semble que ceux qui préparent le règne de l'Antéchrist, aient conçu et adopté ce plan. C'est contre ROME, en effet, que se coalisent, depuis des années, les efforts de toutes les SECTES MAÇONNIQUES. ROME redevenue païenne, ce serait l'étape préparatoire à la royauté romaine de l'Antéchrist. Une grave allocution de LÉON XIII donne à réfléchir. C'est dans le Consistoire du 30 juin 1889 qu'elle a été prononcée :

«Il est douloureux à constater que dans cette auguste Ville où DIEU a établi le domicile de son Vicaire retentisse l'éloge de la raison humaine en révolte contre DIEU, et que là où le monde entier a été instruit à demander les purs principes de l'Évangile et les conseils du salut, aujourd'hui, par l'effet d'un bouleversement criminel, des erreurs coupables et l'hérésie elle-même soient impunément consacrées par des statues. Les événements nous ont conduits à ce point que nous voyons l'abomination de la désolation dans le lieu saint... C'est à un homme impie et perdu de mœurs qu'on élève un monument
(38). Cette ville de ROME, qu'on affirmait devoir être toujours le siège glorieux et assuré des Pontifes Romains, on veut en faire la tête d'une impiété nouvelle en y fondant le culte absurde et insolent de la raison humaine portée comme à un faite divin.»
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La douleur que LÉON XIII épanchait de la sorte au sein du Sacré-Collège, il l'exprimait quelques années plus tard, le 8 décembre 1892, au peuple italien tout entier :

«Peut-on voir sans pleurer la partie la plus privilégiée du troupeau de notre adorable Rédempteur, un peuple toujours demeuré fidèle pendant dix-neuf siècles, exposé aujourd'hui à toute heure au péril imminent de l'apostasie et entraîné dans la voie des erreurs et des vices, des misères matérielles et des abjections morales ?... Mais d'où vient-elle cette guerre ? Elle sort surtout de cette
SECTE MAÇONNIQUE dont Nous vous avons entretenus au long dans l'Encyclique HUMANUM GENUS, du 20 avril 1884, et plus récemment, le 15 octobre 1890, en Nous adressant aux évêques, au clergé et au peuple d'ITALIE. Par ces deux lettres, Nous avons arraché le masque dont la MAÇONNERIE se couvrait aux yeux du peuple, et Nous l'avons dévoilée dans sa hideuse difformité, dans son action ténébreuse et funeste... Grâce aux complots, à la corruption et à la violence, elle est parvenue à dominer l'ITALIE et ROME elle-même...(39)
Dans l'Encyclique HUMANUM GENUS, rappelée par l'auguste Pontife et l'une des premières de son Pontificat se trouvait déjà cet avertissement solennel :


«Dans l'espace d'un siècle et demi, la secte des FRANCS-MAÇONS a fait d'incroyables progrès. Employant à la fois l'audace et la ruse, elle a envahi tous les rangs de la hiérarchie sociale et commence à prendre, au sein des États modernes, une puissance qui équivaut presque à la souveraineté... À l'égard du Siège Apostolique et du Pontife romain, l'inimitié de ces sectaires a redoublé d'intensité. Après avoir, sous de faux prétextes, dépouillé le Pape de sa souveraineté temporelle, nécessaire garantie de sa liberté et de ses droits, ils l'ont réduit à une situation tout à la fois inique et intolérable, jusqu'à ce qu'enfin, en ces derniers temps, les fauteurs de ces sectes en soient arrivés au point qui était depuis longtemps le but de leurs secrets desseins : à savoir que le moment est venu de supprimer la puissance sacrée des Pontifes romains et de détruire entièrement cette Papauté qui est d'institution divine...(40)

Aux deux opinions exposées, l'événement accompli donnera une solution péremptoire. Jusqu'à cette époque, elle demeure indécise. Si JÉRUSALEM devient le siège de l'empire de l'Antéchrist, ses principaux fauteurs auront été les Juifs ; si c'est ROME, ce seront les FRANCS-MAÇONS.
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QUATRIÈME CHOSE INDÉCISE : Le temple où l'Antéchrist se fera adorer
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SAINT PAUL a dit : «L'adversaire qui s'élève au-dessus de tout ce qui est appelé DIEU, ou qui est adoré, jusqu'à s'asseoir dans le temple de DIEU, se faisant lui-même passer pour DIEU» (II THESSALONICIENS II, 4.)
 
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Quel sera le temple témoin de cette abomination ?

a) Une première opinion désigne le temple de JÉRUSALEM qui serait en partie ou en totalité relevé de ses ruines par l'Antéchrist, et où il se ferait rendre les honneurs divins. Elle est adoptée par SAINT IRÉNÉE, SAINT HIPPOLYTE, SAINT CYRILLE DE JÉRUSALEM, SAINT DAMASCÈNE, SEVER, SULPICIUS et un certain nombre d'exégètes tant anciens que modernes. C'est selon son sens propre et littéral qu'il faut, disent-ils, prendre le mot temple. Car, au temps de SAINT PAUL, auteur de cette ÉPÎTRE AUX THESSALONICIENS, c'était le temple de JÉRUSALEM qui portait le nom de Temple par antonomase ; on le désignait simplement par ce nom, comme cela ressort de SAINT LUC (ACTES III et V) et d'autres textes. Alors il n'existait pas encore de temples chrétiens, et seul le TEMPLE DE JÉRUSALEM était appelé Temple de DIEU. Il est donc plus vraisemblable, dit SUAREZ, que c'est de lui qu'a parlé SAINT PAUL, (41).

b) À l'encontre de ce sentiment, une seconde opinion répond qu'il n'est point démontré que SAINT PAUL, en prédisant que l'Antéchrist s'assiéra dans le TEMPLE DE DIEU, ait eu en vue celui de JÉRUSALEM. En effet, SAINT JÉRÔME, expliquant les paroles de l'Apôtre, dit : «Il s'assiéra dans le TEMPLE DE DIEU, c'est-à-dire ou dans JÉRUSALEM, comme quelques-uns le pensent, ou dans l'Église, ce qui nous paraît plus vrai (42)SAINT CHRYSOSTOME dit aussi : «Non dans le TEMPLE DEJÉRUSALEM, mais dans le TEMPLE DE l'ÉGLISE (43).» Mais comment l'Antéchrist s'assiérait-il dans le TEMPLE DE l'ÉGLISE ? THÉODORET l'explique : «Ce que l'Apôtre appelle le TEMPLE DE DIEU, ce sont les églises dans lesquelles cet impie prendra le premier rang, la première place, s'efforçant de se faire reconnaître pour DIEU (44).» THÉOPHYLACTE l'explique encore plus clairement : « Non pas dans le TEMPLE DEJÉRUSALEM, mais simplement dans les églises, dans tout TEMPLE consacré à DIEU (45).» C'est aussi le sentiment de SAINT HILAIRE, DE CAJETAN, VILLALPAND, ESTIUS, etc.

Devant ce partage d'opinions, SAINT AUGUSTIN a jugé la question indécise : « Quel est le TEMPLE DE DIEU où l'Antéchrist doit s'asseoir ? Sera-ce sur les ruines du TEMPLE que SALOMON avait fait bâtir ? Sera-ce dans l'Église de DIEU ? Cela est incertain (46)». Il faut se mettre à la suite de l'évêque d'HIPPONE et convenir que cette question, comme celle relative au siège de l'empire de l'Antéchrist, reste indécise.
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IV - CHOSES FANTAISISTES
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Plusieurs Pères et plusieurs exégètes, entraînés par leurs études, ont tenté de pénétrer plus avant et jusque dans l'intime de la vie de l'Antéchrist. Nous ne rejetons pas a priori les opinions qu'ils ont émises et nous gardons bien de les taxer de faussetés. Mais comme ces opinions n'ont pour base ni des textes évidents de l'Écriture, ni la Tradition patristique, nous les rangeons sous la rubrique de fantaisistes, n'attachant d'ailleurs à cette expression rien de blâmable ni d'irrespectueux, et seulement le sens d'opinions libres et peu fondées. L'événement pourra seul leur faire attribuer la note qui leur convient. Mais s'il advient qu'un démenti leur soit donné, il ne faudra pas oublier que fréquemment les Pères et les exégètes n'émettent que des opinions personnelles, sans avoir le moins du monde la prétention de trancher les questions. 
In dubiis libertas, a dit SAINT AUGUSTIN ; et c'est pourquoi les Pères et les exégètes en question ont droit qu'on respecte leur sentiment jusqu'à preuve historique du contraire ; et si l'événement oblige, dans l'avenir, à l'abandonner, que ce soit toujours en sauvegardant l'honneur des personnes et leur autorité.

Ce principe de loyale et respectueuse exégèse établi, on peut se demander ce qui a déterminé et tracé pour plusieurs cette voie de fantaisie. La réponse ressort elle-même de leurs pages : ce sont les attraits du figurisme :

On sait que l'Église a toujours enseigné l'existence d'un sens figuré dans la sainte Écriture, et cette existence repose sur l'affirmation de la parole de DIEU elle-même : Ces choses leur arrivaient en figure, dit SAINT PAUL, rappelant plusieurs traits du séjour des Israélites dans le désert (47). Notre-Seigneur lui-même a établi l'existence du sens figuré en nous montrant dans JONAS, enseveli pendant trois jours dans le ventre d'un poisson, l'image allégorique de son séjour au tombeau (48). Mais si certains passages de l'Écriture présentent un sens figuré en sus du sens littéral, il y a un danger à éviter, qui consiste soit à rechercher ce sens figuré dans chaque passage de l'Écriture, soit à le multiplier outre mesure. On tombe alors dans l'erreur du figurisme.


Mais comment l'Antéchrist a-t-il pu devenir le point de mire d'études figuristes et occasionner les choses fantaisistes qui vont être énumérées ?

Voici comment :
 
 
Il y a dans le livre de DANIEL un chapitre, le XIè, tout particulièrement consacré à ANTIOCHUS ÉPIPHANE et à ses gestes (du vers. 21 au vers. 45). Son nom n'est point mentionné ; il est uniquement désigné par l'appellation de ROI DU NORD ou de l'AQUILON. La plupart des interprètes, anciens et modernes, n'ont pas hésité à le reconnaître, tant les événements, décrits d'avance, se rapportent exactement à son règne. Il y a plus : on admet encore généralement qu'ANTIOCHUS est la figure de l'Antéchrist. Mais là commencent les divergences et aussi l'occasion des abus.

Selon quelques-uns, le morceau entier (vers. 2l-45) ne se rapporterait qu'à l'Antéchrist.
 
Selon d'autres (surtout au temps de SAINT JÉRÔME), il se rapporterait littéralement à ANTIOCHUS ; au figuré, à l'Antéchrist.

D'autres pensent qu'il n'est question de l'Antéchrist qu'à partir du verset 36.

D'autres enfin que certains traits seulement lui sont consacrés.

Ce sont les partisans des trois premières opinions, notamment des deux premières, qui ont peut-être exagéré les rapports entre ANTIOCHUS et l'Antéchrist. En quoi les auraient-ils exagérés ? En ce qu'ils se sont emparés de chaque verset de cette page biblique pour en composer, comme s'ils étaient des documents historiques, une vie anticipée et détaillée de l'Antéchrist. Assurément ANTIOCHUS ÉPIPHANE doit être considéré comme le type le plus complet, le plus achevé, de l'Antéchrist. Nous-même, en cet écrit, avons plus d'une fois signalé les rapports existants entre ces deux adversaires du vrai DIEU. Mais ces rapports doivent être établis avec modération. Il ne faut pas perdre de vue cette vérité essentielle, à savoir que les personnages devenus, par une permission divine, des types de l'avenir, forma futuri  (49), ne le sont point ordinairement dans la totalité de leur vie, c'est-à-dire dans chacun de leurs actes. Nous n'entendons point assurément limiter l'action de l'ESPRIT-SAINT, mais constater un fait général. C'est seulement par tels ou tels traits de leur existence que les personnages figuratifs ont annoncé l'avenir. Par rapport au vrai CHRIST, MELCHISÉDEC ne l'a figuré que dans son double caractère de Roi et de Pontife ; ISAAC, dans sa patience et son sacrifice ; JACOB, dans sa vie voyagère et ses rudes labeurs ; JOSEPH, dans les persécutions que lui firent subir ses frères et dans son élévation. Or il en est de même de la personne et de la vie de l'Antéchrist. Elles n'ont été figurées que sous tel ou tel aspect par divers personnages, NÉRON, GALÈRE, JULIEN L'APOSTAT, MAHOMET, ANTIOCHUS ÉPIPHANE, jamais en totalité. Ce serait donc par un abus du sens figuratif qu'on a cru pouvoir tracer d'avance la vie de l'Antéchrist en la calquant sur celle d'ANTIOCHUS, d'après tous les versets et tous les détails du chapitre XI de DANIEL. S'il y a eu excès, les auteurs engagés dans cette voie l'auraient évité, en éclairant leur marche de cette règle spéciale du sens mystique : «Il ne faut jamais attribuer à l'Écriture un sens mystique qui ne soit confirmé par quelque autre passage de l'Écriture entendu dans un sens littéral, autrement on attribuerait aux Livres saints une doctrine qu'ils n'enseignent point (50)
C'est en dehors de cette règle qu'il a donc été annoncé, peut-être avec danger d'erreur :

a) Que l'Antéchrist naîtra à BABYLONE
SAINT JÉRÔME), (51), ANDRÉ DE CÉSARÉE, ARÉTAS, BÈDE, HAIMO, RABBANUS, STRABUS, SAINT ANSELME, RUPERT, PETRUS COMESTOR, LUDOLPHE LE CHARTREUX, SAINT ANTONIN, J. GERSON), - en SYRIE (LACTANTIUS FIRMIANUS) ; - en ÉGYPTE (ANASTASIUS SINAÏTA).

b) Qu'il sera le fruit d'un commerce illicite (SAINT HIPPOLYTE, SAINT
ÉPHREM, SAINT DAMASCÈNE, DOM. SOTO).

c)Que son éducation s'accomplira à BETHZAÏDE et à COROZAIM, villes maudites par J
ÉSUS-CHRIST (RABBANUS, SAINT ANSELME, SAINT ANTONIN).


d) Que ses éducateurs seront des magiciens qui, dès son enfance, le pénétreront de leurs principes, et l'instruiront dans les sciences occultes (SAINT CYRILLE DE JÉRUSALEM, RABBANUS, VIGUERIUS, LYRANUS).

e) Qu'il saura par cœur toute l'Écriture et connaîtra tous les arts (SAINT ANSELME).

f)
Que bien que son Ange gardien ne lui soit pas ôté, cependant il ne pourra exercer aucun acte efficace à son égard, à cause de son obstination et de l'influence des démons sur lui (SAINT ANTONIN, BENED. JUSTINIANUS).

g) Que les débuts de son règne et de sa puissance se feront à Babylone (SAINT J
ÉRÔME, ANDRÉ DE CÉSARÉE, ARÉTAS), - à CAPHARNAÜM et COROZAÏM (SAINT ANTONIN).

h) Que dix rois se coaliseront contre lui, mais qu'en ayant vaincu trois, le roi d'ÉGYPTE, le roi d'AFRIQUE et le roi d'ÉTHIOPIE, les sept autres se soumettront. Qu'il éprouvera une défaite navale de la part de certains peuples les occidentaux, mais qu'il ne tardera pas à réparer cet échec passager ; qu'ayant triomphé de tous ses ennemis, il deviendra maître de la terre entière (SAINT HIPPOLYTE, SAINT IR
ÉNÉE, SAINT CYRILLE, SAINT JÉRÔME, THÉODORET, SAINT ÉPHREM, LACTANCE, V. BÈDE, SAINT ANSELME, etc.).

i) Qu'il parviendra à cette domination non seulement par les armes, mais par la ruse et aussi par l'appât des biens temporels. Que les démons lui découvriront tout l'argent caché, toutes les mines précieuses, en sorte qu'il possédera en abondance l'or et l'argent et s'en servira pour séduire (
SAINT ANSELME, PETR. COMESTOR).

j) Qu'il opérera avec l'aide du démon tous les miracles de JESUS-CHRIST : guérissant les lépreux, les aveugles, faisant marcher les paralytiques, ressuscitant même les morts (
SAINT HIPPOLYTE, SAINT ÉPHREM, LACTANCE, SAINT ANSELME, etc.).

k) Qu'ayant jeté bas le masque de l'hypocrisie, il aura des mœurs épouvantables, s'adonnant aux turpitudes de la passion des femmes (
SAINT JÉRÔME).

l) Ajoutons que ses palais eux-mêmes, sa cour, ses vêtements, ses objets précieux, ses parfums, ses repas n'ont pas échappé à une description minutieuse (MALVENDA).

m) Qu'enfin il sera frappé et exterminé à Apadno, sur la montagne des Oliviers, alors qu'il tentera de s'élever dans le ciel, à l'exemple du Sauveur. (
SAINT JÉRÔME, SAINT JÉRÔME, SAINT AMBROISE, LYRANUS).

Cet ensemble de détails ne constitue-t-il pas comme une vie de l'Antéchrist vécue d'avance ? Doit-on les mépriser et les écarter comme inventions fausses et imaginaires ? Non, car dans le domaine du mal tout est possible, Satan devant être l'auxiliaire de l'Antéchrist. Mais des points d'interrogation doivent cependant être placés à la suite de chacun d'eux. Tous ces détails, en effet, ne sauraient être admis ni comme certains, ni comme probables, ni même comme indécis, l'indécision supposant, elle aussi, un point de repère.

Or, ni les uns ni les autres de ces détails ne se trouvent confirmés par des textes précis de l'Écriture entendus dans leur sens littéral, pas plus qu'ils ne reposent sur une indéniable tradition.

Cette tradition fait défaut, puisque, des choses avancées, les unes ne sont émises que par des Pères isolés, les autres par des Pères en plus grand nombre sans doute, mais dont le chiffre ne suffit pas à constituer le consentement unanime, base d'une tradition indiscutable. Les dires de ces Pères ne sont que des opinions personnelles, dignes d'attention et de respect, mais en dehors des anneaux formant la chaîne traditionnelle.

De plus, point de textes scripturaires évidents. C'est principalement sur le chapitre XI de DANIEL, entendu selon le sens figuré ou mystique, que ces opinions reposent. Mais, pour présenter de la valeur, elles devraient avoir également l'appui de quelque autre passage de l'Écriture entendu dans son sens littéral. Or, cet appui, c'est en vain qu'on le cherche pour elles. Aucun des trois portraits de l'Antéchrist, contenus aux chapitres VII de DANIEL, XIII de l'APOCALYPSE, II de la IIè ÉPÎTRE AUX THESSALONICIENS, étudiés dans leur sens littéral, ne confirme ces diverses allégations relatives à la vie de l'Antéchrist. Encore une fois, nous ne les rejetons point, pas plus que nous ne les admettons. Plusieurs d'entre elles peuvent être vraies, comme elles peuvent être fausses. Jusqu'à ce que l'avenir en décide, elles ne doivent être regardées et acceptées que comme des fantaisies, des suppositions.
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Mais en voilà assez de cet horizon noir, tout rempli de l'homme du péché, de celui que SAINT IRÉNÉE a appelé «le résumé de l'universelle iniquité (52)». Portons nos regards d'un autre côté, là où des vaillances entourées de lumière se dessinent. Ce sont les champions des Vérités chrétiennes qui vont apparaître. Ils auront la mission de combattre, contre l'Antéchrist, les combats du Seigneur.
 

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(1) HIERON, Epist. 151, ad Algasiam, quest. II. - Comm. in DANIEL, II, 24 ; - in ABDIAM XVIII ; - in ZACHARIE II, 17.
(2) CHRYSOSTOME Homil. XI, in Joannem.
(3) AMBROISE in Psalm., XLIII.
(4) ÉPHREM Serm. de Antichr.
(5) GR
ÉGOIRE Magn ; in I Regum, II.
(6) JEAN DAMASC
ÈNE De fide orthodoxa, lib. IV, cap. XXVII.
(7) HIPPOLYTE Oratio de consummat. mundi.
(8) SAINT JEAN V, 43.

(9) Enumérons certains de ces faux CHRISTS : - THEUDAS en PALESTINE, l'an 45. - SIMON LE MAGICIEN en PALESTINE, an 34-37. - MÉNANDRE même époque. - DOSITÉE en PALESTINE, an 50-60. - BAR-KOCHBAS en PALESTINE, an 138. - MOÏSE dans l'ile de CRÈTE, an 434. - JULIEN en PALESTINE an 530. - Un Syrien sous le règne de LÉON L'ISAURIEN, an 721. - SÉRÉNUS en Espagne, an 724. -Un autre en FRANCE an 1137. - Un autre en PERSE, an 1138. - Un autre à CORDOUE an 1157. - Un autre à FEZ an 1167. - Un autre en ARABIE an 1167. - Un autre en BABYLONIE, an 1168. - Un autre en PERSE an 1174. - DAVID ALMUSSER en MORAVIE an 1176. - Un autre, an 1280. -DAVID ELDAVID en PERSE an 1200. - ISMAËL-SOPHI en MÉSOPOTAMIE an 1497. - Le rabbin LEMLER en AUTRICHE an 1500. - Un autre en ESPAGNE an 1534. - Un autre dans les INDES-ORIENTALES, an 1615. - Un autre en HOLLANDE an 1624. - ZABATHAÏ TZEVI en TURQUIE an 1666.
(10) SAINT THOMAS, Opusc. de Antichristo, Sect. I, §. Dico tertio. - SUAREZ, De Antichristo, Sect., I, n° 7.
(11) «Ces expressions : un temps, des temps et la moitié d'un temps, signifient un an et deux ans et la moitié d'un an ; et par conséquent trois ans et six mois.., et, dans un autre passage des Écritures, le nombre des mois le déclare.» (SAINT AUGUSTIN Cité de DIEU liv. XX, n°23.)
- La persécution d'ANTIOCHUS a duré également trois ans et demi.

«Antichristi suprema potestas ac monarchia tantum par tres annos et dimidium durabit. Loquor autem de monarchia et suprema potestate, quia, ut dicitur, data est illi potestas in omnem tribum, et populum, et linguam et gentem. Quantum vero temporis in augenda stabiliendaque monarchia ponere debeat, non mihi constat ; quia neque ex prœdictis locis satis colligitur, neque videtur admodum verisimile, brevi tempore trium annorum cum dimidio haec omnia esse perfecturum. Illud ergo solum est certum, ad summum permansurum in throno suo tribus annis cum dimidio, statimque et ipsum interficiendum, et regnum ejus evertendum» (SUAREZ De Antichr., sect. II, n°3)
(12) FILLION La Sainte Bible commentée : DANIEL ch. VII, V. 23-27.
(13) BOSSUET, APOCALYPSE, préface, § 13.  
(14) THÉODORET oratio 7 in Danielem.  
(15) HIÉRONYME In DANIEL XI, 21. 
(16) FILLION La sainte Bible commentée. 
(17) HIPPOLYTE De consummatione mundi.  
(18) MALVENDA De Antichristo, liv. III, ch. V. «Cùm exploratum sit Antichristum Judæis pro vero Messia recipiendum, quis nescit Judœos nullum unquam pro Messia habituros, cujus originem non habeant compertam Judaici sanguinis esse» 
(19) Procès-verbaux du GRAND SANHÉDRIN  
(20) Arch. ISRAËL, ann. 1847, p. 801.  
(21) GENÈSE XLIX, 17 
(22) CORN. A LAPIDE, GENÈSE XLIX.  
(23) JÉRÉMIE VIII, 18 
(24) SAINT AUGUSTIN  
(25) THÉODORET  
(26) SAINT GRÉGOIRE LE GRAND Rupert.  
(27) ANDRÉ DE CÉSARÉE  
(28) BÈDE Alcuin.  
(29) MALVENDA De Antichristo, lib. IX.  
(30) VIGOUROUX Les Livres saints et la critique rationaliste, t. IV, p. 636 ; 2e édit.  
(31) Voir DOM BENOIT, La Franc-Maçonnerie, t.I. p. 247-262, Paris 1886. 
(32) IRÉNÉE Adv. hœres., lib. V, cap. xxv.  
(33) SUAREZ De Antich., sect. V, obj. VI.  
(34) APOCALYPSE XI, 7 -8 
(35) Archives Israélites, 10 août 1905, p. 249-252. - Voir notre ouvrage l'Avenir de JÉRUSALEM (Espérances et chimères) : Réponse aux Congrès Sionistes, Paris, librairie Poussielgue.  
(36) APOCALYPSE XI, 7 -8 
(37) Sur cette tradition, voir Cornel. à LAPIDE II EPÎTRE AUX THESSALONICINS II, 7. et Comm. sur l'APOCALYPSE ch. XVII, 1-2. - Dans l'édition Vivès, t. XIX. p. 155 et t. XXI, p. 307-309. Elle est adoptée, entre autres exégètes, par SIXTE DE SIENNE, BELLARMIN, ALCAZAR, SALMERON, SUAREZ - Cfr. Drach, Comment sur l'APOCALYPSE p. 127.  
(38) Érection du monument de GIORDANO BRUNO
(39) Lettre de S. SAINT LÉON XIII au peuple italien, le 8 décembre 1892. - Comme preuve des légitimes doléances de LÉON XIII, qu'on lise le document suivant du grand-maître de la Franc-Maçonnerie, LEMMI, document qui fut distribué à tous les francs-maçons d'ITALIE :
«... Du T..., 10 octobre 1890.
«Aux Vénérables Frères des Loges italiennes,«L'édifice que les FF... sont en voie d'élever dans le monde ne pourra être regardé comme arrivé à bon point tant que les FF... d'ITALIE n'auront pas fait don à l'humanité des décombres de la destruction du grand ennemi.
«L'entreprise avance rapidement en ITALIE..... Nous avons appliqué le ciseau au dernier refuge de la superstition, et la fidélité du F... 33.. qui est à la tête du pouvoir politique (M. CRISPI) nous est une garantie que le VATICAN tombera sous notre marteau vivifiant.
«Mais il est nécessaire que, lors des prochaines élections politiques, quatre cents FF... au moins entrent à la Chambre législative comme députés.....Les derniers efforts rencontreront de plus grands obstacles du côté du chef des prêtres et de ses vils esclaves......
«Le G...O... invoque le génie de l'humanité pour que tous les FF... travaillent de toutes leurs forces à disperser les pierres du VATICAN pour construire avec elles le temple de la Nation émancipée.
«Le G...O...de la Vallée du TIBRE»
 

(40) Encyclique HUMANUM GENUS de S. S. LÉON XIII, 20 avril 1884.
(41) SUAREZ De Antichristo, sect. V.  
(42) HIÉRONYME Ad Algariam, quœst., II.  
(43) CHRYSOSTOME In II ad THESSALONICIENS II.  
(44) Théodor., In II ad THESSALONICIENS II. 
(45) THÉOPHYLACTE In II ad THESSALONICIENS, II.  
(46) AUGUSTIN Civit. Dei, lib. XX, n° XIX.  
(47) 1 CORINTHIENS X, 11.  
(48) JONAS III, 14 ; MATTHIEU XII, 40.  
(49) ROMAINS V, 14.  
(50) «Nihil est sub sensu spirituali alicui loco tribuendum quod non per alium locum in sensu litterali manifeste traditum inveniatur, ut quanquam quæ in uno loco exponuntur, ad tropologiam vel allegoriam spectent, in aliis tamen locis ad litteram dicta ostendantur » (Salmeron, Comm. in Evangel. hist., prol. XIX, canon V, 1592, t.I, p. 345. - VIGOUROUX, Man. bibl., t. I, p. 285, 8è édition.  
(51) Les noms entre parenthèses sont ceux des principaux partisans des diverses opinions.  
(52) «Recapitulatio universæ iniquitatis » (Iræn., Adv. hœres., lib. V, c. XXVIII.)
 
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01/01/2010

L'ANTÉCHRIST par AUGUSTIN LÉMANN (3)

L’NTÉCHRIST
par AUGUSTIN LÉMANN (3)
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CHAPITRE TROISIÈME
Les champions de la Vérité chrétienne contre l'Antéchrist.
 
Ce qu'ils seront au point de vue de l'énergie de la foi, SAINT AUGUSTIN l'a exprimé dans ce cri d'admiration : «Que sommes-nous en comparaison des saints et des fidèles des derniers temps, puisque, pour les éprouver, DIEU déliera un ennemi (1), contre lequel, quoique enchaîné, nous ne pouvons lutter qu'avec de si grands dangers ? (2)» SAINT HIPPOLYTE a dit aussi : «O heureux ceux qui vaincront un tel tyran ! Ils seront, il faut l'avouer, plus illustres et plus héroïques que leurs devanciers (3)

Quels seront-ils donc ces héros de l'avenir ?

D'abord l'Église elle-même, l'Église militante, compacte dans sa hiérarchie, avec l'auguste personne de son Chef, avec ses évêques, ses prêtres, ses religieux, avec tous ses ministres. Aucune mesure, si savante, si oppressive soit-elle, n'aura la puissance de leur fermer la bouche. Lorsque le pèlerin, à la Ville des Papes, visite l'église souterraine de Sainte-Marie-in-Via-Lata, autrefois une prison, il y lit, non sans émotion, cinq mots gravés sur les murailles, reproduction de ceux que, dans ce lieu même, l'Apôtre SAINT PAUL écrivit à son disciple TIMOTHÉE

«La parole de DIEU ne s'enchaîne pas, Verbum Dei non est alligatum (4)». 

Lui-même, l'Apôtre SAINT PAUL, a été, de ce nouvel axiome, la démonstration vivante. Libre, il prêcha sur presque toutes les plages du monde alors connu ; prisonnier, il ne cessa jamais de prêcher.

La parole de DIEU ne s'enchaîne pas ! Des lèvres de l'Apôtre, ces mots se sont placés, depuis, sur celles de tous les membres de la hiérarchie catholique. Ils vibraient encore, il y a quelques années, sur les lèvres de ce vieil archevêque de Paris, de si douce et si grande mémoire, le cardinal GUIBERT, lorsque, à une circulaire ministérielle qui avait la prétention de réglementer les mandements des évêques, il fit cette calme et fière réponse : «Monsieur le Ministre, on n'enchaîne pas plus la parole d'un évêque, qu'on n'enchaîne un rayon de soleil».

La parole de DIEU ne s'enchaîne pas ! Ces mots seront encore, aux mesures que prendra l'Antéchrist, la réponse de l'Église. L'Église ! Ah ! Elle restera inébranlable dans la mission que lui a confiée son divin Fondateur : 

«Allez et enseignez toutes les nations... leur apprenant à observer tout ce que je vous ai commandé. Et voici que je suis avec vous tous les jours jusqu'à la consommation des siècles (5)». 

Enseigner la vérité chrétienne, l'enseigner à toutes les nations, l'enseigner tous les jours, l'enseigner jusqu'à la consommation des siècles, tels sont le précepte et la prophétie. Rien ne saurait en empêcher l'accomplissement. Et si les flots de la persécution, grossissant toujours, se mettent à monter et à monter encore, veut-on savoir ce qu'il adviendra de l'Église ?... À mesure que les eaux du déluge montaient, dit un texte mystérieux de la GENÈSE, l'arche, tranquille sur ses destinées, s'élevait de terre et montait dans le sublime : Elevaverunt arcam in sublime à terra (6)
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Le sublime ! Oui, voilà, pour l'Église, les effets des persécutions. Elle montait dans le sublime et parlait de plus haut, lorsque, au siècle de JULIEN L'APOSTAT, à l'injonction qui lui avait été faite de cesser tout enseignement, elle répondait par des voix qui se nommaient ATHANASE, GRÉGOIRE DE NAZIANZE, AUGUSTIN, JEAN CHRYSOSTOME ! L'Église montera encore dans le sublime, lorsque, dans la persécution de l'Antéchrist, la plus redoutable de toutes celles qu'elle aura subies, elle poursuivra sa mission avec une fermeté qu'a célébrée d'avance la parole magnifique du Père LACORDAIRE :


«Les princes, s'écriait un jour, dans la chaire de NOTRE-DAME DE PARIS, l'illustre dominicain, les princes pourront bien se réunir pour combattre les prérogatives de l'Église, les charger de noms flétrissants afin de les rendre odieuses, dire que c'est une puissance exorbitante qui perd les États : nous les laisserons dire, et nous continuerons à prêcher la vérité... Si l'on nous envoie en exil, nous le ferons en exil ; si l'on nous jette dans les prisons, nous le ferons dans les prisons ; si l'on nous enchaîne dans les mines, nous le ferons dans les mines ; si l'on nous chasse d'un royaume, nous passerons dans un autre. Mais si l'on nous chasse de partout, si la puissance de l'Antéchrist vient à s'étendre sur toute la face du monde, alors, comme au commencement de l'Église, nous fuirons dans les tombeaux et dans les catacombes. Et si enfin on nous poursuit jusque-là, si l'on nous fait monter sur les échafauds, dans tout noble cœur d'homme nous trouverons un dernier asile, parce que nous n'aurons pas désespéré de la vérité, de la justice et de la liberté du genre humain (7)».

Le second champion de la vérité chrétienne contre l'Antéchrist sera une phalange de Docteurs, suscités de DIEU pour ces temps d'épreuve. Jamais les docteurs, astres bienfaisants, n'ont manqué à l'Église. Mais ce qu'il y aura alors de particulier, c'est que cette phalange de docteurs recevra, pour le soutien et la consolation des bons, une plus grande intelligence de nos Saintes Écritures. Le prophète DANIEL en a fait l'annonce dans un autre passage de son livre, également consacré à la persécution de l'Antéchrist : 

«Les impies, dit-il, agiront avec impiété, et tous ces impies n'auront pas l'intelligence, mais ceux qui auront la science de Dieu comprendront (8)».

Ce qui signifie que tandis que les impies, frappés d'aveuglement, accompliront les dernières prophéties, comme autrefois les Juifs, sans les comprendre, les docteurs de l'Église, inondés de nouvelles lumières et pénétrant les passages les plus obscurs de ces prophéties, y trouveront l'explication des événements de cette époque, et, prémunissant les fidèles contre les artifices de l'Antéchrist, ils les maintiendront dans la fermeté et la confiance, dans l'attachement à l'Église et à ses divins enseignements, au prix même de la vie. Sous cette parole de feu des docteurs de vérité, l'enseignement chrétien, si persécuté, si traqué qu'il puisse être, brillera encore d'un tel éclat, et un si grand nombre lui devront leur persévérance, que le même prophète DANIEL, dans une description sommaire de la vie future, tracée d'une manière rapide, fait exception à l'égard de ces docteurs des derniers âges ; il s'arrête devant eux, et les montrant du doigt : «Ceux, dit-il, qui en auront instruit plusieurs dans la justice brilleront comme des étoiles dans des éternités sans fin (9)».

Le troisième champion de la vérité chrétienne contre l'Antéchrist sera le peuple chrétien demeuré fidèle. Il en fut ainsi chez le peuple juif, au temps de la persécution d'ANTIOCHUS.

«Le peuple qui connaît son DIEU s'attachera à la Loi et l'observera (10).» 

Le peuple qui connaît son DIEU ! À l'opposé des apostats, il y aura donc un peuple de fidèles, et ce peuple de fidèles se montrera hautement, énergiquement attaché à la Loi. 

«Croyons, dit SAINT AUGUSTIN, que ni les conversions, ni les apostasies ne manqueront à l'Église ; mais les parents, pour faire baptiser leurs enfants, et les nouveaux fidèles, déploieront tant de force, qu'ils triompheront du diable déchaîné ; et tout, ruses plus perfides, efforts plus violents que jamais, tout échouera contre la vigilance de leur sagesse et la force de leur patience... Car, s'il faut avouer que la charité d'un grand nombre doit se refroidir à la vue de l'iniquité triomphante, et que, par des persécutions inouïes, des ruses jusqu'alors inconnues, le démon, libre de ses chaînes, doit entraîner la chute de beaucoup qui ne sont pas écrits au livre de vie ; il faut croire aussi que non seulement ceux dont la foi sortira victorieuse de l'épreuve de ce temps-là, mais plusieurs même du dehors, aidés de la grâce de DIEU et de la considération des Écritures qui prédisent la fin des temps dont ils sentiront l'approche, trouveront alors plus de fermeté pour croire ce qu'ils ne croyaient pas, et plus de force pour vaincre le diable déchaîné (11)

Mais voici la merveille : La prophétie de DANIEL ajoute :

«Et les docteurs du peuple en instruiront beaucoup, et ils tomberont sous le glaive, par la flamme, par la captivité, et par des brigandages prolongés (12).» 

Remarquable est cette expression : les docteurs du peuple ! Mais quoi ! Ce titre de «docteurs» que décerne le prophète, n'est-il pas réservé dans l'Église ? Ne demeure-t-il pas l'apanage des intelligences d'élite qui ont consumé leurs veilles à l'acquisition, souvent ardue, de la vérité ? On dit : les docteurs de l'Église, mais les docteurs du peuple ?... Admirons les délicatesses divines : Ce titre de docteur, juste récompense du talent uni au travail, l'ESPRIT-SAINT l'attribue également, et avec infiniment de justesse, à des petits parmi le peuple que la grandeur de leur foi a transformés en apôtres. Qui n'en a rencontré sur son chemin de ces docteurs du peuple ? Quelque obscur ouvrier, une humble servante, des enfants même. Il tombait de leurs lèvres comme des jets de lumière : c'est l'amour qui les faisait jaillir, l'amour qui voit aussi loin, souvent plus loin que l'intelligence. Autour du berceau de sa foi, notre ville de LYON a entendu de ces docteurs du peuple, et depuis, dans sa reconnaissance, elle n'a plus séparé l'humble BLANDINE du grand saint IRÉNÉE ! Ce sera aussi dans ces docteurs du peuple que l'Église des derniers âges rencontrera une de ses principales forces, pour tenir tête à l'Antéchrist. Apôtres intrépides des vérités chrétiennes, ils les feront retentir dans les ateliers et les échoppes, dans les carrefours et les campagnes. Aussi l'Antéchrist les aura-t-il en haine, les tenant comme l'un des plus grands obstacles à l'établissement de son règne tyrannique. Il les poursuivra avec férocité. Les uns tomberont sous le glaive, les autres par la flamme, par la captivité et des brigandages prolongés. Quel sera le nombre de ces enfants du peuple à la fois docteurs et martyrs... Le Seigneur s'en est réservé le secret. Mais si vaste que puisse être le champ de leurs combats, saluons-les d'avance : les fils du peuple y seront tombés par la cause du CHRIST et de ses vérités ! Trois champions ont déjà passé sous notre regard : l'Église, les docteurs, le peuple fidèle. Reste un quatrième champion, ménagé comme secours extraordinaire, et dont on ne peut parler qu'avec une certaine réserve, à cause du mystère qui l'entoure : c'est le retour et la prédication simultanée d'ÉNOCH et d'ÉLIE, désignés probablement dans l'APOCALYPSE sous le nom des DEUX TÉMOINS (13).

Voici ce qu'on en peut dire, d'après la Tradition et l'Écriture :
a) II est certain qu'ÉNOCH et ÉLIE ne sont pas morts, ÉNOCH «ayant été enlevé pour qu'il ne goûtât point la mort», ce sont les expressions de SAINT PAUL (14), et ÉLIE ayant disparu du côté du ciel «sur un char à chevaux de feu (15)». Tous les Pères sont d'accord sur ce point.
b) Il est également certain que, tenus ainsi en réserve dans un lieu connu de DIEU seul, ÉNOCH et ÉLIE doivent revenir pour prêcher au milieu des hommes : « ÉLIE doit en effet revenir et il rétablira toutes choses» (16), a dit Notre-Seigneur lui-même ; et le livre de l'ÉCCLÉSIASTIQUE affirme d'ÉNOCH : «qu'il a été transporté dans un paradis, pour apporter de là la pénitence aux nations» (17). Aussi BELLARMIN a-t-il pu conclure : «Nier l'avènement futur et personnel d'ÉLIE, c'est une hérésie ou une erreur qui approche de l'hérésie (18).» Et BOSSUET, non moins affirmatif, s'écrie : «Il faut être plus que téméraire pour improuver la tradition d'ÉNOCH et d'ÉLIE à la fin des siècles(19)
Vie toujours permanente d'ÉNOCH et d'ÉLIE, retour de l'un et de l'autre au milieu des hommes, pour y prêcher la pénitence et raviver la foi, voilà donc deux points certains.

Mais à quand l'époque précise de ce retour ?

C'est là que la réserve dont nous parlions tout à l'heure est commandée. Et cependant la Tradition catholique presque tout entière s'accorde à placer ce retour au temps de l'Antéchrist, et à reconnaître ÉNOCH et ÉLIE dans les deux fameux témoins de l'APOCALYPSE, auxquels incombera l'enviable et glorieuse mission de combattre en face le fils de perdition.

Voici ce célèbre passage de l'APOCALYPSE :

«Et je donnerai mission à mes DEUX TÉMOINS, et ils prophétiseront pendant mille deux cent soixante jours, revêtus de sacs. Ce sont les deux oliviers et les deux candélabres qui se trouvent en présence du Seigneur de la terre. Et si quelqu'un veut leur nuire, un feu sortira de leur bouche, et dévorera leurs ennemis ; et si quelqu'un veut les offenser, il périra de la même manière. Ils ont le pouvoir de fermer le ciel, pour qu'il ne pleuve pas durant les jours de leur prophétie : et ils ont sur les eaux le pouvoir de les changer en sang, et de frapper la terre de toute sorte de plaies, toutes les fois qu'ils le voudront. Et lorsqu'ils auront achevé leur témoignage, la Bête, qui monte de l'abîme, leur fera la guerre, les vaincra et les tuera (20)

Il est de toute évidence que l'APOCALYPSE, en cet endroit, parle de DEUX TÉMOINS, prédicateurs au milieu des hommes et antagonistes de la Bête, antagonistes de l'Antéchrist ; mais parce que, fidèle à la trame de mystère qui va de sa première à sa dernière page, l'APOCALYPSE ne nomme pas expressément ces DEUX TÉMOINS, tout en les désignant suffisamment, ici encore s'impose l'obligation de la réserve. Mais, nous le répétons, la Tradition catholique presque tout entière s'accorde à les nommer, et, de sa grande voix, elle crie : les DEUX TÉMOINS, antagonistes de l'Antéchrist, seront ÉNOCH et ÉLIE ! Le cadre restreint de ce travail ne nous permet pas de rapporter ici ces monuments de la Tradition ; mais les grands commentateurs bibliques, tels que CORNELIUS A LAPIDE et ESTIUS, les tiennent à la disposition de nos lecteurs et, à la suite des témoignages cités, ils pourront lire ces lignes : «Qu'ÉNOCH et ÉLIE soient encore vivants, et qu'ils doivent l'un et l'autre, avant le jugement, prêcher contre l'Antéchrist, c'est l'ancienne tradition de l'Église à laquelle la plupart des Pères rendent témoignage : «Vetus est Ecclesiæ traditio, cujus plerique Patres etiam meminerunt (21).» Et avant ESTIUS et CORNÉLIUS, SAINT THOMAS avait déjà écrit :

«ÉNOCH a été enlevé dans un paradis terrestre, où la croyance le fait vivre conjointement avec ÉLIE jusqu'à l'avènement de l'Antéchrist (22)

Les deux grands témoins de l'Évangile, au temps de l'Antéchrist, seront donc, tout nous autorise à le croire, ÉNOCH et ÉLIE : envoyés, l'un, aux chrétiens prévaricateurs pour les reprendre ; l'autre, aux Juifs incrédules pour les rappeler. À celui-là, plus particulièrement les Nations ; à celui-ci, les restes de JACOB ; mais à tous deux la prédication de l'Évangile ; à tous deux la défense de la vérité chrétienne.

Et alors, sous le tonnerre de ces deux voix dominant les mugissements de la tempête, quel spectacle digne des regards du Ciel ! Ce n'est plus seulement l'Église, avec ses ministres, ses docteurs et ses fidèles qui fait retentir le CREDO des vérités chrétiennes, ce sont encore les siècles du passé qui ressuscitent et entrent en lice pour proclamer JÉSUS-CHRIST. Les siècles de la Loi de nature, représentés par le patriarche ÉNOCH ! Les siècles de la Loi écrite, représentés par le prophète ÉLIE ! Siècles de la Loi de nature et siècles de la Loi écrite, les voici qui donnent la main aux siècles de la Loi de grâce, et se dressant tous ensemble en face de l'Antéchrist, qui résume, lui aussi, toutes les hérésies, tous les schismes, toutes les persécutions du passé, ils lui crient et ils crient à toutes les extrémités de la terre : JÉSUS-CHRIST est DIEU ! Lui seul est le Rédempteur !... Ne sera-ce pas l'Église s'élevant encore dans le sublime, Elevaverunt arcam in sublime a terra (23)
 
 

(1) «Et (angelus) apprehendit draconem, serpentem antiquum, qui est diabolus et satanas ; et ligavit eum per annos mille, et post hoec oportet illum solvi modico tempore» (APOCALYPSE XX, 2-3.) 
(2) SAINT AUGUSTIN Cité de DIEU liv. XX, n° 8 
(3) SAINT HIPPOLYTE De consum. mundi 
(4) II TIMOTHÉE II, 9 
(5) SAINT MATTHIEU XXVIII, 19, 20.
(6) GENÈSE VII, 17. « Multiplicatoe sunt aquoe, et eleraverunt arcam in sublime a terra
(7) LACORDAIRE VIe conférence : Des rapports de l'Église avec l'ordre temporel, t. II, p.111, Paris, 158 
(8) DANIEL XII, 10 
(9) DANIEL XII. 3 
(10) Id., XI, 32 
(11) SAINT AUGUSTIN Cité de DIEU liv. XX, n° 8
«
Erunt ergo multi electi qui non vincentur, et in quibus Ecclesia manebit. Et ideo in Apoc. semper ponitur illa limitatio : Adoraverunt bestiam omnes qui inhabitant terram, quorum non sunt nomina scripta in libro vitæ. Patres etiam supra citati supponunt tunc futuros esse multos, et eximios martyres, qui usque ad mortem erunt in fide constantes ; ergo pari modo in montibus et speluncis perseverabunt multi confessores, qui superstites manebunt post mortem Antichristi. At in eis non deficiet usus sacramentorum et sacrificii Eucharistici in locis abditis. Persecutores enim non poterunt hæc auferre, nisi in eorum cognitionem venerint ; non permittet autem Deus dæmonem aut omnia Sanctorum abdita loca perlustrare, aut persecutoribus revelare »(SUAREZ De Antichristo, sect. VI, n° 5.)
(12) DANIEL XI, 33
(13) APOCALYPSE XI, 3-13
(14) HÉBREUX XI, 5
(15) IV ROIS II, 11 ; ÉCCLÉSIASTIQUE XLVIII, 9
(16) SAINT MATTHIEU XVII, 11.- Voir encore MALACHIE V, 5 ; ÉCCLÉSIASTIQUE XLVIII, 10
(17) ÉCCLÉSIASTIQUE XLIV, 16
(18) BELLARMIN De Rom. Pont., lib. III, c. VI.
(19) BOSSUET Préface à l'Explic. de l' APOCALYPSE XV
(20) APOCALYPSE XI, 3-7
(21) ESTIUS In ÉCCLÉSIATIQUE XLIV, 16 ; XLVIII, 10 ; In APOCALYPSE XI, 1-7 ; -Corn, a Lap., In ÉCCLÉSIASTIQUE et APOCALYPSE
(22) SAINT THOMAS Summa Theol., pars IIIa, q. XLIX, a. 5, ad 2°
(23) GENÈSE VII, 17

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CHAPITRE QUATRIÈME
L'époque de la venue de l'Antéchrist incertaine et sa fixation interdite.
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En quelle année du monde l'Antéchrist fera-t-il son apparition ?
 
Nul ne saurait l'indiquer, la Tradition et l'Écriture étant muettes sur ce point. DIEU seul a la connaissance de cette année et de l'heure. Son secret, il se l'est réservé. Toutes les investigations ont donc échoué. Il y a une borne, elle reste infranchissable. L'apôtre SAINT PAUL, écrivant de l'Antéchrist aux THESSALONICIENS, a fait allusion à cette borne dans les expressions suivantes : 

«Afin qu'il se manifeste en son temps, Ut reveletur in suo tempore (1)

À quelle époque du monde ce temps arrivera-t-il ? L'apôtre SAINT PAUL ne l'ayant pas indiqué, mais s'étant servi d'une expression indéterminée, l'Église, conduite par l'ESPRIT-SAINT et toujours prudente, n'a rien ajouté et n'ajoutera rien à la brève indication de l'Apôtre. Respectueuse de sa réserve, elle s'est abstenue de soulever le voile et de regarder au-delà.

Bien plus, afin de couper court à des indiscrétions qui s'étaient produites, elle n'a pas hésité à défendre sous peine d'excommunication d'annoncer pour époque déterminée la venue de l'Antéchrist ou le jour du Jugement dernier. C'est sous LÉON X, en l'an 1516, le 14 des Calend. de janvier, au Ve concile oecuménique de Latran (sess. XI, Constit. Supernæ majestatis præsidio) que ce décret, dont voici la teneur, a été porté :

«Nous ordonnons à tous ceux qui exercent la charge de la prédication ou qui l'exerceront dans l'avenir qu'ils ne présument pas de fixer dans leurs prédications ou dans leurs affirmations un temps déterminé pour les maux futurs, soit pour l'avènement de l'Antéchrist, soit pour le Jugement : attendu que la Vérité dit : Ce n'est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité : ceux donc qui, jusqu'à présent, ont osé émettre de pareilles choses, ont menti, et il est avéré que, par leur fait, un grand dommage a été porté à l'autorité de ceux qui prêchent sagement (2).»

Les motifs de cette défense sont indiqués dans son texte :

D'abord, le respect dû à la conduite de DIEU. Il est le maître absolu du temps et de ce qui s'y passe ; il ne convient donc pas que les hommes veuillent connaître d'avance, d'une façon indiscrète, le résultat de ses décrets éternels. Leur règle de conduite, à l'égard de ces décrets éternels, est celle qu'a tracée l'auteur inspiré de l'ÉCCLÉSIASTIQUE :

«Ne recherche pas ce qui est au-dessus de toi, et ne scrute point ce qui surpasse tes forces... N'étends pas ta curiosité à toutes les œuvres de DIEU (3)».

Ce respect dû aux décrets et aux œuvres de DIEU, la plume de SAINT AUGUSTIN l'a exprimé dans cette admirable sentence :

«Honore ce que tu ne comprends pas encore, et honore-le d'autant plus que les voiles sont plus nombreux. Plus quelqu'un est digne d'honneur et plus aussi les portières sont multipliées dans sa demeure. Les voiles commandent l'honneur dû au secret, et ils se lèvent pour ceux qui savent honorer (4)».

Le second motif de la défense est d'éviter aux fidèles des préoccupations troublantes, danger pour les devoirs à remplir à l'heure présente. Qu'on se rappelle la frayeur des THESSALONICIENS que SAINT PAUL fut obligé de rassurer : 

«Nous vous conjurons, mes Frères, de ne point vous laisser troubler ni épouvanter... comme si le jour du Seigneur était proche (5)».

Et après avoir tracé le portrait de l'Antéchrist au chapitre II de son épître, l'Apôtre le fait suivre, au chapitre III, de ce conseil :

«Nous apprenons que quelques-uns parmi vous se conduisent d'une manière inquiète, ne travaillant pas, mais n'agissant que pour satisfaire leur curiosité. Or, nous ordonnons à ces personnes, et nous les conjurons par le Seigneur JÉSUS-CHRIST, de manger leur pain en travaillant paisiblement (6)».

Le troisième motif est d'empêcher les scandales, toujours au détriment des âmes. Car lorsque l'événement ne justifie pas les prédictions hasardées, ceux qui sont faibles dans la foi en prennent occasion de mépriser les prophéties réelles de l'Écriture et d'en douter. Ainsi en a-t-il été plus d'une fois en divers temps ; et l'histoire ecclésiastique a dû enregistrer les noms de plusieurs de ces rêveurs qui avaient eu l'audace d'annoncer pour une époque déterminée l'avènement de l'Antéchrist ; par exemple :
- Un jeune Parisien visionnaire annonça publiquement dans une chaire de Paris, vers 960, que l'Antéchrist apparaîtrait à la fin de l'an 1000. Il fut combattu victorieusement par ABBON, le futur abbé DE FLEURY (7).

- FLUENTINUS DE FLORENCE, condamné en 1105 par PASCAL II ;

- ARNOLD DE VILLENEUVE, condamné en 1311. Il avait fixé l'avènement et la persécution de l'Antéchrist à l'année 1377 ;

- BARTHÉLÉMY IANOUESIUS que le pape URBAIN V condamna pour avoir fixé cet avènement au jour de la Pentecôte de l'an 1360 ;
 
- NICOLAS CUSIN l'annonça pour les années 1700 ou 1734 ;

- MAMMÈRE BRUSCHIUS, pour 1589 ou 1643 ;

- JÉRÔME CARDANE, pour l'année 1800 ;

- M. d'HÉDOUVILLE, entre 1952 et 1953 ;

- L'auteur anonyme des Précurseurs de l'Antéchrist, pour l'année 1957 ;

- L'abbé MAITRE place la fin du monde à la fin du XXe siècle ou dans le courant du XXIe.

Ces exemples ne sont-ils pas une démonstration de la sagesse de l'Église dans la défense qu'elle a faite de fixer une date déterminée soit pour cet avènement, soit pour la fin du monde ? (8)

Est-ce à dire qu'elle défende également d'émettre des conjectures ? Non : la défense portée par le Vème Concile œcuménique de LATRAN ne va pas jusque-là. Elle n'atteint seulement que toute date fixe. Les généralités, les conjectures prudentes, l'indication des signes précurseurs restent choses permises, à l'exemple de certains Pères et d'éminents Docteurs qui ne s'en sont pas fait faute.

- EUSÈBE «signale l'avènement de l'Adversaire, lequel aura la liberté d'assiéger l'Église du Christ (9)».

- JUDA CYR, autre historien ecclésiastique, croit que l'avènement de l'Antéchrist est proche (10).

- TERTULLIEN parle de l'Antéchrist qui s'approche : « Antichristo jam instante  (11)».

- SAINT CYPRIEN : «Vous devez tenir pour certain que le temps de l'affliction a commencé, que la fin du siècle et le temps de l'Antéchrist approchent (12)».

- SAINT HILAIRE avertit de l'Antéchrist imminent : «imminentis Antichristi (13)».

- SAINT BASILE : «Ne sommes-nous pas à la neuvième heure ? N'est-ce pas l'apostasie ? Afin qu'ensuite se manifeste l'Impie, ce fils de perdition ? (14)»

- SAINT AMBROISE : «Parce que nous sommes arrivés au déclin du siècle, certaines maladies en sont les signes. La maladie du monde, c'est la faim ; la maladie du monde, c'est la peste ; la maladie du monde, c'est la persécution (15)».

- SAINT JÉRÔME : «Nous ne prenons pas garde que l'Antéchrist approche (16)».

- SAINT BERNARD décrivant les impiétés de son siècle jette ce cri d'alarme : « Il ne reste plus qu'à voir l'homme de péché, le fils de perdition, faire son apparition (17)».

- SAINT GRÉGOIRE LE GRAND : «Le roi de superbe est proche, «Rex superbiæ prope est (18)»
D'autres citations pourraient être apportées. Qui ne connaît, du reste, la fameuse homélie de ce grand Pape SAINT GR
ÉGOIRE sur «les signes de la fin du monde», homélie que l'Église, chaque année, replace sous les yeux des prêtres et des fidèles, le premier dimanche de l'Avent, pour leur rappeler la fin des temps. De ces signes précurseurs, SAINT GRÉGOIRE constate que les uns sont accomplis, et que les autres ne tarderont pas à l'être. « Ex quibus profecto omnibus alia jam facta cernimus, alia in proximo ventura formidamus (19)

Comme on a pu le constater, aucun des Pères cités ne s'est permis de fixer une date déterminée pour l'avènement de l'Antéchrist ou de la fin du monde. Ils demeurent tous dans des généralités, ils rappellent les signes, ils conjecturent ; ils ne fixent rien. Leur manière de prêcher ou d'écrire est conforme aux annonces à la fois nettes et prudentes de Notre-Seigneur lui-même et de son apôtre SAINT PAUL. Aux chapitres
SAINT MATTHIEU XXIV-XXV, Notre-Seigneur annonce nettement la fin du monde, il en donne les signes précurseurs, mais il ne fixe pas de date. À l'exemple de son Maître, SAINT PAUL, au chapitre II de la IIe épître aux THESSALONICIENS, annonce nettement l'Antéchrist, mais il ne fixe pas de date à son avènement ; il se borne à indiquer le signe précurseur de cet avènement : l'APOSTASIE : Discessio primum et revelatus fuerit homo peccati (20).

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(1) II THESSALONICIENS II, 6
(2) Mandantes omnibus, qui hoc onus prædicationis sustinent, quique in futurum sustinebunt, ut tempus quoque præfixum futurorum malorum, vel Antichristi adventum, aut certum diem Judicii prædicare, vel asserere nequaquam præsumant : cùm Veritas dicat : Non est vestrum nosse tempora vel momenta, quæ Pater posuit in sua potestate : ipsosque qui hactenus similia asserere ausi sunt, mentitos, ac eorum causa, reliquorum etiam rectè prædicantium auctoritati non modicum detractum fuisse constet » (Cit. ap. Ferraris, Prompta bibl., verbo Prædicare. - Mansi, Sacrorum Conciliorum collectio, t. XXXII, p. 945-947.)  
(3) ÉCCLÉSIASTIQUE III, 22-24
(4)«Honora quod nondum intelligis et tanto magis honora quanto plura vela cernis. Quanto enim quisque honoratior est, tanto plura vela pendent in domo ejus. Vela faciunt honorem secreti ; sed honorantibus levantur vela » (SAINT AUGUSTIN, Serm LI, 5.)  
(5)  II THESSALONICIENS II, 1-2
(6) Id., III, 11-12.  
(7) Abbonis apologeticum apud Migne, Patrol, lat., t. CXXXIX, c. 162. (8) Parmi les auteurs qui ont fixé une date à l'avènement de l'Antéchrist, nous avons eu la surprise de rencontrer le vénérable serviteur de DIEU BARTHÉLÉMI HOLZHAUSER, restaurateur de la discipline ecclésiastique en ALLEMAGNE, fondateur de l'Association des Prêtres séculiers vivant en communauté, décédé le 20 mai 1658. Auteur d'une Interprétation de l'APOCALYPSE très en vogue en ALLEMAGNE, et où il y a certainement de très belles et très émouvantes pages, HOLZHAUSER a écrit les lignes suivantes : 
«Au milieu de l'année de Jésus-christ 1855, dans le dix-neuvième siècle, naîtra l'Antéchrist, et il vivra cinquante cinq ans et demi. Et c'est dans les trois dernières années de sa vie et pendant les six derniers mois, c'est-à-dire pendant trois ans et demi qu'il sévira dans la plus grande fureur contre la chrétienté, et que, d'accord avec son faux prophète l'antipape, il exterminera l'Église, dispersera le troupeau de JÉSUS-CHRIST, vaincra et tuera tous les fidèles par la puissance qui lui aura été donnée pour quarante deux mois sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue et sur toute nation, pour faire la guerre contre les saints de DIEU, et pour les vaincre durant le temps qu'il sera assis dans la plénitude de son règne. Ainsi donc, en l'an 1911, le fils de perdition sera tué au milieu de la cinquante-sixième année de sa vie par le souffle, c'est-à-dire par la parole qui sortira de la bouche de JÉSUS DE NAZARETH crucifié», (Interprétation de l'APOCALYPSE, 3e édit., t. II, pag. 120, Paris, 1872 ; librairie Louis Vivès.) - 
Si la cause de béatification du vénérable serviteur de DIEU doit se poursuivre, que ces lignes ne soient pas un obstacle. L'honorable Promoteur de la foi voudra bien examiner de quel esprit elles émanent. Dans le cas où elles ne seraient qu'une interprétation personnelle, ne pourrait-on pas invoquer, en faveur de leur auteur, l'ignorance du décret du Ve CONCILE DE LATRAN, c'est-à-dire la bonne foi. 
Errare humanum est, surtout lorsqu'il s'agit d'un décret recouvert d'une poussière séculaire, et ignoré d'un grand nombre dans l'Église. Si nous avons pris la liberté de remettre ce décret en évidence, c'est afin que, dans les temps troublés devenus ceux de l'Église et de la société humaine, les âmes se tiennent en garde contre des calculs de nature à les inquiéter. 
(9) EUSÈBE Hist. eccl., lib. V, c. I.  
(10) EUSÈBE Hist. Eccl., lib. V, c. VI. 
(11) TERTULLIEN lib. De fuga in persecutione, c. XII.  
(12) SAINT CYPRIEN Epist. LVI ad Thibaritanos.  
(13) HILARION Lib. contra Auxentium.  
(14) SAINT BASILE Epist. LXXI, ad Alexandrinos.  
(15) SAINT AMBROISE Oratio in obit. Satyri fratris.  
(16) HIÉRONYME Epist. II, ad Ageruch.  
(17) SAINT BERNARD Serm. 6 in psalm. 90. 
(18) SAINT GRÉGOIRE Mag, Epist. XXXVIII, ad Joan. Constantin. episc.  
(19) Id., Homil. I, in Evang.  
(20) II THESSALONICIENS II, 3